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et qui contient le nom et le signalement précis de tout individu contumace ou évadé. Ces feuilles signalétiques qui, selon les circonstances, paraissent dix ou douze fois par an, sont envoyées, non-seulement aux chefs des différentes sections de la police, mais à tous les tribunaux, à toutes les préfectures, à toutes les mairies, à toutes les gendarmeries de l’empire. Elles indiquent aussi, dans une annexe très détaillée, les recherches qui doivent être opérées et les renseignemens qui doivent être pris dans l’intérêt des familles : enfans égarés, jeunes filles enlevées, individus éloignés du pays natal, dont on ignore la demeure et dont la présence est utile sur tel ou tel point pour prendre possession d’un héritage ; par la même voie, on demande la constatation de l’identité de cadavres inconnus trouvés sur les routes ou dans les champs, on réclame certains papiers indispensables à des liquidations ou à des contrats. La plus grande partie des découvertes de ce genre sont encore faites par la préfecture, qui, grâce à son double mécanisme actif et administratif, a souvent retrouvé dans les taudis parisiens un pauvre diable qu’une petite fortune attendait chez le notaire de son village.


IV

Lorsqu’un malfaiteur est arrêté, il est provisoirement enfermé au violon ; on le conduit devant le commissaire de police, qui le rend immédiatement à la liberté, si le cas n’offre aucune gravité ou si l’arrestation est le fait d’une erreur ; si au contraire le délit ou le crime reproché ne laisse point de doute, il dresse procès-verbal, et l’inculpé est dirigé sur la préfecture de police dans une de ces voitures cellulaires qui, au nombre de six, visitent trois fois par jour les postes et y récoltent les prisonniers : mesure très humaine introduite dans l’administration depuis 1856, et qui nous évite le spectacle, dont nous avons été si fréquemment témoins jadis, d’un malfaiteur luttant au milieu des rues avec les quatre soldats chargés de l’amener. Les voitures entrent successivement dans la rue de Harlay, et les sergens de ville de la brigade centrale font la haie tout autour afin de mettre bon ordre aux tentatives d’évasion. Les individus arrêtés sont conduits un à un dans un bureau spécial qui fonctionne jour et nuit, et qu’à cause de cela on appelle la permanence. Là on inscrit sur une feuille le nom de l’inculpé, son état civil, la cause de son arrestation, le titre du fonctionnaire qui a libellé l’ordre d’envoi et le nombre de pièces (papiers, objets, etc.) qui sont jointes au procès-verbal. Cette première formalité étant accomplie, chaque individu est conduit au dépôt, vaste prison récemment reconstruite et dont les fenêtres s’ouvrent dans le