Page:Revue des Deux Mondes - 1869 - tome 82.djvu/324

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

nouveau type à côté des autres, nous anticipons un peu sur les événemens ; ce n’est guère que vers 1858 que l’on a vu se formuler nettement le type hydrocarboné, d’où l’on peut faire sortir à peu près toutes les combinaisons organiques. Gerhardt, mort, comme nous l’avons dit, en 1856, n’eut point à sa disposition ce riche complément de la théorie des types ; mais rien ne nous empêche de considérer ici cette théorie dans toute la généralité que lui donne une si importante addition.

Aussi bien il faut nous arrêter un instant sur cette notion des types, avant de marquer la dernière étape qu’a parcourue la chimie moderne. Cette notion subsiste en effet tout entière sous la nouvelle forme que nous allons lui voir prendre. Elle a donc une importance capitale et mérite le plus sérieux examen. Et d’abord, si nous considérons nos quatre types et si nous les rangeons dans l’ordre suivant : hydrogène, eau, ammoniaque, gaz des marais, nous voyons que le premier nous présente un atome d’hydrogène uni à un autre atome d’hydrogène (ou de chlore) ; dans le second, deux atomes d’hydrogène sont unis à un atome d’oxygène ; dans le troisième, trois atomes d’hydrogène sont unis à un atome d’azote ; dans le quatrième enfin, ce sont quatre atomes d’hydrogène qui sont combinés avec un atome de carbone. Il y a là une gradation, une sorte d’échelle qui doit attirer notre attention, et nous voyons bien que nous sommes en face d’une classification qui peut comprendre la presque totalité des corps. Qu’on songe en effet que ces différens atomes d’hydrogène peuvent être remplacés chacun respectivement par toute une série de corps simples, et par une série bien plus nombreuse encore de radicaux composés jouant le rôle de corps simples ! On verra se ranger alors dans les quatre types une innombrable quantité de combinaisons.

Il y a plus, par une dernière évolution, la théorie des types s’est encore considérablement enrichie en établissant les types condensés et les types mixtes. Prenons par exemple deux molécules d’eau et supposons que nous ôtions à chacune d’elles un atome d’hydrogène ; un seul corps, un radical, pourra remplacer à la fois les deux atomes que nous enlevons et souder ainsi en quelque sorte l’un à l’autre les deux résidus des molécules. C’est ainsi que M. Williamson rapporta l’acide sulfurique à deux molécules d’eau dans lesquelles un radical, le sulfuryle (SO2) remplace deux atomes d’hydrogène. Voilà ce qu’on appelle un type condensé, et l’on va comprendre également ce que c’est qu’un type mixte. Au lieu de prendre deux molécules semblables, on peut prendre deux molécules de types différens, une molécule d’eau par exemple, et une molécule d’acide chlorhydrique. Comme tout à l’heure, un certain