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ingénieux. «C’est dans ce moment où des hommes turbulens et malveillans se sont mis en action pour troubler la conscience du pape, que les évêques doivent mettre le plus grand zèle pour lui démontrer qu’il n’a fait que reconnaître les vrais principes, qui sont aussi les leurs. Sa majesté n’attend pas un grand effet de cette démarche; mais elle peut être, suivant les circonstances, utile à produire. Le concordat est désormais une loi de l’état. Sa majesté le regarde comme un traité plus sacré que tous les autres, ayant été fait par le pape et par lui directement, ayant été signé par eux devant quatre cardinaux, un évêque italien et quatre évêques français[1] » — Son imagination s’échauffant peu à peu sur cette adresse des évêques qu’il avait d’abord jugée inutile, mais qui pouvait, suivant les circonstances, être bonne à produire, il se met incontinent à en dicter lui-même les termes. « Les archevêques et les évêques ne doivent rien savoir de la protestation du pape. On la leur laissera complètement ignorer, mais on leur donnera l’ordre de se rendre le lendemain comme d’eux-mêmes à Fontainebleau; comme d’eux-mêmes aussi, ils remettront leur adresse au pape. Après quoi ils partiront immédiatement pour leurs diocèses... »


« Voici dans quel sens, poursuit l’empereur, pourrait être rédigée l’adresse, — Les soussignés, archevêques et évêques de l’empire et du royaume d’Italie, s’étant rendus aux ordres de sa majesté pour faire à votre sainteté nos félicitations sur un concordat qui doit opérer le rétablissement de la paix de l’église, voient avec peine que votre sainteté n’ait point encore fait d’actes en exécution de ce traité, ce qui donne lieu à des inquiétudes, et ce qui laisse dans l’état de viduité un grand nombre d’églises. Ils se flattent que sa sainteté viendra à leur secours. Le concordat de Fontainebleau a été une inspiration de l’Esprit-Saint au chef de l’église pour faire cesser les maux dont elle est affligée. C’est donc avec peine qu’ils voient que l’on aurait depuis cherché à lui donner quelque inquiétude à ce sujet. En leur qualité d’évêques et de théologiens, ils y donnent leur complet assentiment, et supplient sa sainteté de vouloir bien s’entendre avec le chef de l’état pour donner les institutions canoniques, etc.. Quant aux cardinaux français, il fallait leur écrire de faire leur supplique séparément[2]. »


Certes il y a lieu de s’étonner de l’inconcevable activité de ce chef d’empire qui trouvait ainsi moyen de faire tant de choses par lui-même. Il ne lui suffisait pas d’organiser division par division, compagnie par compagnie, et de passer continuellement en revue les

  1. L’empereur au ministre des cultes, 25 mars 1813. (Cette lettre n’est pas insérée dans la Correspondance de Napoléon Ier.)
  2. Lettre de l’empereur au ministre des culte, 25 mars 1813; non insérée dans la Correspondance de Napoléon Ier.