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Son fils Charles XV, qui lui succéda en 1859, eut bientôt l’occasion de montrer avec quelle ardeur il s’associait aux espérances Scandinaves. Les exigences de l’Allemagne contre le Danemark s’étaient renouvelées à mesure que les perfides combinaisons de 1852 produisaient leurs résultats calculés et prévus, c’est-à-dire la dissension et l’anarchie; la Prusse menaçait, gagnait du terrain. Quand il fut évident qu’une seconde guerre à l’occasion des duchés était imminente, pendant l’été de 1863, le roi de Suède ouvrit avec le roi de Danemark des négociations pour une alliance défensive. Déjà étaient rédigées les instructions que devait recevoir à ce sujet le comte Henning Hamilton, représentant du cabinet de Stockholm à Copenhague, quand survint la mort de Frédéric VII, le 15 novembre 1863. Le lendemain, M. de Manderström, le ministre des affaires étrangères, disait encore que rien n’était changé dans les dispositions du cabinet de Stockholm; mais le 20, apprenant les prétentions du duc d’Augustenbourg, il demandait aux puissances signataires du traité de Londres s’il ne fallait pas se concerter, et dans la pensée de cette entente commune s’évanouissait celle de la négociation engagée avec le Danemark. On peut se rappeler combien les événemens se précipitèrent alors, en dépit de cet impuissant traité de Londres qui avait cru prévenir tous les dangers. Subitement, au milieu de ce trouble, quand le projet d’union était de fait abandonné, le roi Charles XV le reprit de son autorité privée, mais en ajoutant cette fois à la proposition d’une ligue défensive celle d’une confédération définitive de tout le nord, répondant à la fois aux nécessités présentes et aux vœux de l’avenir. Nous nous servirons ici, pour retracer ce curieux épisode de l’histoire du scandinavisme encore très mal connu dans la nord même, de documens inédits que nous devons à de précieuses communications.

En avril 1864, pendant qu’un armistice et la convocation d’une conférence à Londres suspendaient les hostilités de l’Allemagne contre le Danemark, le roi de Suède envoya par son bibliothécaire, M. de Qvanten, deux lettres autographes adressées, l’une au roi de Danemark Christian IX, et l’autre à l’évêque Monrad, président du conseil des ministres à Copenhague. À ces lettres était joint un projet dont voici les principales dispositions : la Suède, la Norvège et le Danemark formeraient entre eux une confédération de nature à réaliser pour ces trois royaumes une parfaite communauté de politique et de défense extérieures; cette communauté s’étendrait aux autres branches de gouvernement ou d’administration, d’industrie ou de commerce, intéressant à la fois les trois états. Chaque peuple devait conserver absolument intactes ses propres institutions. Pour atteindre l’unité politique, on instituerait un parlement fédéral,