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LA PROVINCE


PENDANT LE SIÈGE DE PARIS




SA SITUATION POLITIQUE ET SOCIALE




L’impression de la province à la nouvelle de la révolution du 4 septembre fut une profonde stupeur. Ce n’est pas que les populations eussent conservé la foi napoléonienne ; les désastres du mois d’août avaient produit un grand déchirement dans l’âme populaire. L’idole de la veille avait été renversée sous la colère de ses plus fervens adorateurs. Ces bourgeois et ces paysans, affamés d’ordre et de sécurité matérielle, se regardaient tout à coup comme des dupes et des victimes ; l’empereur tombait sans exciter un regret, sans provoquer un mouvement de pitié ou de sympathie. Il y avait contre lui cette violente explosion de haine que l’on rencontre chez l’homme ruiné par un mandataire longtemps estimé et tout à coup découvert infidèle. La fin de l’empire était donc prévue et paraissait nécessaire. Les habitudes et les traditions politiques des Français ne permettaient pas qu’un pouvoir aussi humilié se maintînt ou reparût ; mais l’événement du 4 septembre impliquait autre chose que la chute d’une dynastie : il se produisait dans des circonstances et avec des caractères qui excitèrent la réprobation sourde de la province presque entière. — Il faudrait singulièrement méconnaître le tempérament politique des département pour ne pas comprendre : qu’ils furent alarmés, irrités de ces procédés. La province est avant tout éprise de légalité ; elle se disait, avec raison, que, s’il suffisait