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efforts pour découvrir un lien quelconque entre cette maladie et les agens atmosphériques qui peuvent exercer une action sur le corps humain. Le baromètre, le thermomètre, l’hygroscope, la girouette, furent questionnés, mais aucun de ces instrumens ne put révéler la cause des oscillations bizarres du fléau qui venait périodiquement décimer la population. On se mit alors à accuser les puits. Pour en éliminer l’influence, la ville fut, dès 1860, pourvue d’une eau de source d’excellente qualité ; mais, comme pour railler l’impuissance des hommes, le typhus revint la même année avec un redoublement d’intensité, et les quartiers qui étaient alimentés par l’eau de source furent aussi maltraités que ceux qui buvaient encore l’eau des puits. Il était donc manifeste que la cause déterminante des retours du typhus ne devait être cherchée ni dans les agens atmosphériques, ni dans l’eau potable. Restait le sous-sol. C’est M. Pettenkofer qui eut l’idée de rattacher les phénomènes typhoïdes à l’influence du sous-sol, et en particulier aux marées des eaux souterraines.

Ce chimiste a suivi pendant plus de dix ans les mouvemens de l’eau dans le sol de Munich et de quelques autres localités, et il a constaté que l’étiage du lac souterrain offre des variations considérables d’une année à l’autre et même parfois dans l’espace de quelques semaines ; les différences de niveau peuvent aller à plusieurs mètres. La comparaison de ces variations avec celles de l’épidémie typhoïde, écrites en regard, a révélé la marche concordante des deux phénomènes. Toutes les fois que le niveau des eaux souterraines est tombé d’une manière sensible, le typhus a présenté une recrudescence marquée, et on le voit diminuer aussitôt que les eaux remontent. Dans son Journal de Biologie, M. Pettenkofer a publié en 1868 une carte qui renferme les courbes de la mortalité causée par le typhus à Munich, celles de l’eau tombée et celles de l’étiage moyen des eaux souterraines pour chaque mois pendant douze ans, de 1856 à 1867. Il suffit de jeter un coup d’œil sur ces tracés pour reconnaître immédiatement l’étroite ressemblance des oscillations du lac souterrain et de celles de l’épidémie. Si l’on cherche des yeux l’étiage le plus bas qui ait été observé depuis 1856, on le trouve en regard de l’épidémie la plus terrible qui fût constatée dans le même espace de temps : c’est celle de l’hiver de 1857-1858. L’épidémie la plus intense après celle-ci a été l’épidémie de 1865-1866 ; elle répond au second minimum de l’étiage. Cette coïncidence des minima relatifs de l’étiage et des maxima relatifs de la mortalité subsiste encore pour l’hiver de 1863-1864, pour 1862 et pour 1861. On peut faire la preuve inverse et chercher à quelle époque a eu lieu l’étiage le plus élevé de la nappe souterraine ; on le rencontre en 1867, c’est-à-dire dans l’année où le typhus offrit la moindre intensité depuis 1857, le nombre des cas de décès se réduisant alors à 96. Le parallélisme frappant des deux