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rer le fonctionnement de la justice, l’exercice des cultes, l’instruction de la jeunesse, l’administration du pays. A cet emploi doivent être consacrés les premières ressources, les revenus les plus clairs de l’état. Viendront ensuite les besoins moins urgens, dont on mesurera la part selon le supplément de sacrifices qu’il sera permis de demander aux contribuables. Malheureusement le régime le plus sévère ne pourra contre-balancer le poids des nouvelles dépenses. On ne saurait échapper à l’augmentation des impôts. Il est pénible, après les ruines accumulées depuis un an, de venir au milieu des propriétés ravagées, des fortunes compromises, des populations souffrantes, prélever au nom de l’état une part plus grosse que de coutume. Il est cruel de venir disputer à chaque citoyen une parcelle de ce qu’il a pu sauver, quand au contraire on serait tenté de lui tendre une main secourable; mais, quelles que soient les répugnances, il faut subir cette loi de notre destinée, et nous devons accepter courageusement cette dernière épreuve avec la pensée que notre résignation à supporter ces sacrifices sera le meilleur gage de notre patriotisme et le moyen le plus sûr de rendre bientôt à la France sa puissance et sa grandeur.

C’est donc par le jeu combiné de ces deux procédés, la diminution des dépenses et l’augmentation des impôts, qu’on peut désormais réussir à constituer l’équilibre du budget. Nous allons essayer d’examiner, au premier de ces points de vue, les mesures qui pourraient aboutir à ce résultat désirable. Auparavant, pour définir avec plus de précision le but que nous voudrions atteindre, nous commencerons par évaluer l’accroissement des charges imposées au trésor public par les derniers événemens, et par mesurer l’écart qu’il faut remplir au moyen des économies et des surtaxes.


I.

Au 1er janvier 1870, la dette consolidée s’élevait en chiffres ronds, déduction faite de 3 millions de rentes appartenant à la caisse d’amortissement, à la somme annuelle de 360,500,000 francs. Depuis cette époque, ce chiffre s’est accru de tous les emprunts qui ont servi à payer les frais de la guerre. Il s’accroîtra encore de tous ceux qui auront lieu pour solder les dépenses de la douloureuse campagne de 1871, pour acquitter l’indemnité prussienne et pour suppléer à l’insuffisance du rendement des impôts, tant que les choses n’auront pas repris leur cours régulier. Nous ne connaissons pas encore exactement le chiffre des dépenses militaires engagées depuis un an; d’après les déclarations du chef du pouvoir exécutif, elles monteraient à 1 milliard 663 millions pour l’exercice 1870, et