Page:Revue des Deux Mondes - 1871 - tome 96.djvu/205

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
LE
BOURGEOIS DE PARIS
AU DIX-HUITIEME SIECLE

Mémoires inédits de Siméon-Prosper Hardy, 1764-1790. — Manuscrits de la Bibliothèque nationale, 8 vol. in-folio.


I

Tout le monde connaît ou du moins croit connaître le moderne bourgeois de Paris, celui qui vit sous nos yeux, dans notre société, et qui est quelque peu de notre famille. En regard de ce personnage, illustré par le roman, par le théâtre et par les révolutions, héros semi-tragique de notre histoire intérieure depuis quatre-vingts ans, présentons ici une figure plus simple et d’un dessin plus sévère : c’est l’ancien bourgeois de Paris, tel qu’il existait en 1771, déjà pénétré des influences nouvelles, mais ferme dans ses traditions, fidèle aux mœurs du passé, et gardant, en dépit des excitations de la politique, un fonds de sagesse héréditaire plein de promesses pour l’avènement d’un véritable esprit de liberté. Le Parisien d’autrefois, le bourgeoisie la vieille roche n’est pas très difficile à peindre ; il a des opinions tranchées et des affections stables ; on sait ce qu’il est, il sait ce qu’il veut : c’est un caractère. Façonné par une étroite discipline, : il manque d’audace, et, comme nous disons, d’initiative ; un reste de préjugés offusque sa raison, il y a plus d’un côté provincial, dans cette nature neuve encore. Pour le bien juger, écoutons-le, car il à cédé, lui aussi, à l’humeur communicative du siècle et à la mode des indiscrétions, il a conté ce qu’il voyait, il a tenu