de fantaisies financières le conseil municipal de Lyon a sa valeur comme avertissement ; mais il en est un qui, pour venir de plus loin, je veux dire des États-Unis, ne paraîtra pas dépourvu de fores et d’à-propos. New-York a le bonheur de posséder un conseil municipal démagogique, élu grâce à l’abstention politique des classes supérieures. Une fois les maîtres, qu’ont fait les ultra-démocrates ? Ils n’ont eu rien de plus pressé que d’élever l’impôt sur le capital. Ils l’ont appliqué, sans préjudice des autres taxes, jusqu’à 3 3/4 pour 100 aux dépenses municipales, à ce point que telle maison se trouve imposée à New-York dix fois plus qu’elle ne le serait à Paris. Encore un coup, sommes-nous à l’abri de semblables aventures ? Qui nous en garantit ? Est-ce par hasard notre assiduité aux élections ? Serait-ce la certitude que la majorité ne se laissera jamais entraîner à de pareils courans ? Songeons-y bien ; une fois qu’on aurait réussi à faire prévaloir telle solution agréable aux masses, fût-elle peu équitable et même plus désavantageuse qu’utile en fin de compte, il serait fort difficile de revenir sur ses pas.
Il y aurait lieu, avant d’entrer dans un examen plus spécial, de s’interroger sur la valeur du radicalisme comme méthode. C’est bien une méthode en effet. Un des chefs du radicalisme de ce temps-ci, débordé à l’avance par son propre parti, M. Gambetta, adressait, il y a peu de temps, une lettre à un conseiller-général, et dans sa personne il engage tous les conseils-généraux de France à rechercher dans toutes les questions administratives ou économiques de leur ressort les solutions les plus radicales et les plus démocratiques. Ainsi voilà la démocratie radicale devenue le critérium et comme l’équivalent de la vérité en toute matière sociale ! Ce n’est pas à la démocratie de se conformer à la science, c’est à la science de se faire démocratique et radicale ! Et si la nature même des choses répugne au radicalisme ? Comment ne pas voir que nous avons affaire ici à un dogme se plaçant, comme la république, au-dessus même de la discussion, et dont il n’y a plus qu’à tirer les conséquences ? L’intolérance avec laquelle les dissidens sont traités plus en hérétiques et en impies qu’en simples adversaires devrait seule nous en avertir.
Ni la science ni la société modernes ne s’accommodent de cette unité abusive, de cette simplicité extrême, de cette logique à outrance. Tout s’est compliqué en réalité. Comment vouloir réduire à l’unité absolue cette multiplicité qu’on trouve dans les faits accumulés par l’observation, cette diversité de points de vue qui va parfois jusqu’à la contradiction ? La méthode radicale devrait perdre du terrain loin d’en gagner. Si différens, si opposés parfois même que semblent être entre eux les faits, ils résistent au nom du droit