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Page:Revue des Deux Mondes - 1871 - tome 96.djvu/547

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cour du Vatican ordonnait aux confesseurs d’imposer comme un devoir de conscience aux soldats italiens de déserter dès qu’ils le pourraient faire sans péril de la vie.

Il faut enfin, ajoute le parti national libéral, séparer les intérêts de la société laïque de ceux de la société religieuse. La Bavière par exemple est désarmée vis-à-vis du clergé : le concordat de 1817 et l’édit de religion maintiennent encore entre les mains de Rome la plupart des droits de souveraineté que l’église possédait au moyen âge. Les évêques, à qui le gouvernement avait interdit la publication des décrets du concile, n’ont point tenu compte de cette défense, et le 15 mai 1871 ont adressé au ministre des cultes une lettre collective dans laquelle ils soutenaient « être fondés en droit à ne point admettre la nécessité du placet royal. » C’est donc au nom de la légitime défense que les « nationaux libéraux » demandent hautement la séparation de l’église et de l’état, et, si les gouvernemens ne se décident à une démarche aussi terrible pour l’église, une large réforme législative semble toutefois inévitable en ce qui touche à l’instruction publique et aux actes de l’état civil.

L’opposition contre Rome s’est manifestée depuis plusieurs années non-seulement dans la plupart des provinces du nouvel empire germanique, mais également dans celles de la monarchie austro-hongroise. L’Autriche avait repris depuis 1815, et sous l’influence de M. de Metternich, son ancien caractère théocratique. En 1855, elle avait conclu avec Rome un concordat qui reconnaissait l’entière liberté des évêques à nommer les curés, publier leurs mandemens, assembler des conciles provinciaux, et punir de peines disciplinaires les prêtres comme les laïques qui désobéissaient aux ordres de l’église. L’épiscopat était remis en possession du droit de censure sur tous les écrits publiés dans les diocèses; les cas de droit ecclésiastique ne relevaient plus que des seuls tribunaux de l’église, et les différends relatifs aux mariages eux-mêmes devaient être tranchés d’après le droit canonique. Enfin l’enseignement primaire et secondaire ne pouvait plus être donné que dans les établissemens catholiques. L’Autriche, après Sadowa, a eu l’intelligence de remonter à la cause de ses malheurs, et a dénoncé en 1867 ce concordat, qui avait énervé chez elle, avec la liberté civile et religieuse, la virilité de la nation. Aujourd’hui les rapports avec Rome de ce pays jadis si fidèle ne ressemblent guère à ceux du passé. Le saint-siège put en voir la preuve le jour où, en janvier 1871, la question romaine fut portée devant les délégations; deux députés seulement sur cent soixante délégués osèrent, au milieu de l’hilarité de leurs collègues, protester contre l’occupation de Rome par les Italiens, et M. de Beust refusa au nonce du pape de blâmer