son existence même, se résignant aux plus lourds impôts pour maintenir une armée immense, recrutée dans tous les rangs de la société, la nation américaine a consacré à l’enseignement, pendant les années même les plus désastreuses, des sommes sans cesse croissantes et bien plus élevées qu’avant ces terribles épreuves. C’est que le peuple a compris que c’était le plus sûr moyen de faire triompher la cause de la justice et de l’humanité. » Ainsi s’exprimait, il y a quelques années déjà, M. Randall, surintendant de l’instruction publique à New-York. Depuis lors, la plupart des états de l’Union ont beaucoup fait pour remplir ce magnifique programme. Ce sont les réformes réalisées et les progrès accomplis aux États-Unis dans le domaine de l’enseignement depuis la fin de la guerre civile que nous essaierons de faire connaître.
Quoique les pertes que la France a subies depuis un an soient immenses, presque incalculables, elles sont loin d’égaler celles qu’a éprouvées l’Amérique durant la guerre civile[1]; et pourtant jamais l’Union n’a été aussi puissante, aussi prospère qu’aujourd’hui. Elle supporte sans nul effort une dette de 16 milliards de francs et une dépense annuelle de 2 milliards; chaque année elle rembourse plus d’un 1/2 milliard. Avant vingt ans, sa dette sera éteinte, si elle le veut. Sa population s’accroît d’environ 1 million 1/2 par an, c’est-à-dire de l’équivalent de trois départemens français. Cela signifie que, pour ajouter à sa puissance actuelle une force égale à celle de l’Angleterre, il lui faut vingt ans. L’étendue et la richesse du sol sont sans doute la base et la condition de cette prodigieuse progression; mais ce qui la détermine et la rend possible, c’est la culture du peuple, le développement de la raison. C’est grâce à la force de l’esprit que les Américains tirent du sol les richesses qu’il contient, et vivent libres, préservés du despotisme et de l’anarchie. En doutez-vous? Voyez le Mexique : il a des territoires aussi vastes et plus riches. Il les laisse en friche, les inonde de son sang et s’abîme dans le désordre.
- ↑ M. David Wells, «commissaire spécial pour le revenu des États-Unis, » dans son remarquable rapport pour 1870, montre que les dépenses et les pertes occasionnées par la guerre civile se sont élevées pour les fédéraux à 6,300,000,000 dollars,
pour les confédérés à 2,700,000,000 dollars.
Total 9,000,000,000 dollars.
Soit 9 milliards de dollars, ou 45 milliards de francs, calculés non en greenbacks, mais en or. Voyez Official report on the revenue of the United-States, reprinted by the Cobden Club.