Suisse, par H. de Humboldt au Mexique, et dans les montagnes de l’Auvergne par M. Lecoq et moi[1]. Plus rare lorsqu’on s’avance dans le nord, la callina est habituelle en Espagne, en Algérie, en Abyssinie, de juin à septembre. M. Wilkomm[2], qui l’a observée dans la péninsule, pense, comme les habitans du pays, qu’elle s’accroît et diminue avec la chaleur. Plusieurs fois il a fini par atteindre les lieux enveloppés de callina ; à mesure qu’il s’approchait, tout devenait clair et distinct, la callina semblait fuir devant lui, comme dans le désert l’eau fantastique, effet des illusions du mirage, fuit devant le voyageur impatient de l’atteindre. Au lieu de ces vagues apparences que revêt souvent la callina, nous la vîmes dans la journée du 25 août former un anneau complet faisant tout le tour de l’horizon et interrompu seulement par des montagnes aussi élevées que le Canigou. Cet anneau, d’un gris rougeâtre comme la fumée, était nettement délimité, et M. Bassot put constater à l’aide du théodolite que le bord supérieur était éloigné de 90 degrés du zénith (exactement 100 grades, 87’). L’anneau se maintint toute la journée jusqu’au soir, où il devint moins distinct. Le lendemain, le soleil levant, sortant de la mer au milieu des brumes matinales, montait lentement au-dessus de l’horizon comme un disque rouge dépouillé de rayons. Il entra dans la callina ; ses apparences ne changèrent pas, mais au moment où il sortit de cette fumée atmosphérique, les rayons jaillirent tout à coup de l’orbe incandescent et éclairèrent tout le paysage d’une lumière subite. Nous vîmes alors l’ombre immense du Canigou, qui se prolongeait dans l’ouest jusqu’aux cimes les plus éloignées ; elle diminua peu à peu en se rapprochant, et s’évanouit enfin dans la vallée de la Têt. Le jour était venu, précédé d’une aurore prolongée, et le soleil en quittant la callina était assez élevé au-dessus de l’horizon pour illuminer à la fois la plaine et la montagne.
Je crois en avoir dit assez pour que le lecteur soit pénétré de l’importance et de la difficulté des travaux géodésiques. Ces travaux sont le fondement de la géographie, et celle-ci à son tour est la base de l’art militaire, dont toutes les combinaisons reposent sur une connaissance exacte de la géographie et de la topographie des contrées où les armées ennemies manœuvrent les unes contre les autres. On sait ce que l’ignorance de la géographie de notre propre pays nous a coûté, et l’on s’étonnera que les travaux géodésiques soient si peu prisés par ceux-là mêmes qui sont destinés à en recueillir les fruits. Croirait-on que les campagnes géodésiques ne comptent pas comme des campagnes militaires et ne soient