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REVUE. — CHRONIQUE.


personne ne veut accepter du papier de la république. Les capitaux étrangers n’osent pas se montrer ; où trouver de la protection[1] ? On sait qu’en cas de litige il faut souvent commencer par acheter les juges, qui appartiennent au plus offrant. On spécule sur ces juges ; à Mexico, il y a des individus qui font métier d’acheter des procès désespérés, qu’ils se chargent de gagner, eux. Une caisse d’épargne, la première, a été fondée après bien des hésitations ; elle végète péniblement, car, pour un Mexicain, confier son argent à un établissement public, c’est lui dire adieu ; il préfère l’enfouir, le perdre au jeu, le manger. Il est d’ailleurs difficile de trouver un bon placement pour les sommes déposées ; d’interminables formalités et un droit de timbre exorbitant dégoûtent le public des hypothèques. Périodiquement on agite la question d’un emprunt à négocier avec les États-Unis pour ranimer un peu les affaires et pour activer les travaux publics commencés ; mais les États-Unis ne se sépareront pas de leurs dollars sans un bon gage territorial, et, si on leur donne un doigt, ils pourraient bien prendre la main. Qui sait d’ailleurs si les événemens qui s’accomplissent en ce moment ne forceront pas le Mexique de se mettre à la remorque de son puissant voisin ?


THÉÂTRE-FRANÇAIS.
L’AUTRE MOTIF, comédie en un acte, en prose, de M. Éd. Pailleron.
Reprise de TURCARET.

Pourquoi dit-on que, dans les relations des deux sexes, les hommes prennent toujours, et sans se croire obligés à réfléchir, l’initiative ? Il y a des cas où ils font preuve d’une assez grande prudence, et, bien que nous n’ayons pas de coutumes ou de tribunaux qui leur imposent cette conduite, on les voit assez communément et de fort bonne heure faire briller en eux cette sagesse britannique. Il en est qui la portent jusqu’à l’excès de la bonne opinion sur eux-mêmes ; ils craignent si fort de compromettre une jeune femme à marier, qui souvent ne pense pas à eux, qu’on est obligé de voir dans cette pruderie masculine une crainte comique de hasarder leur précieuse personne. Que sera-ce donc si l’on ajoute à tous ces circonspects ceux qui, poussés par un motif autre que le bon, et engagés dans la voie d’une galanterie où nul péril ne menaçait jusque-là leur aimable célibat, apprennent tout à coup l’apparition de l’ennemi, et aperçoivent le mariage en perspective ? La crainte

  1. Au plus fort de l’insurrection, une dépêche datée du 30 janvier, que nous trouvons dans les journaux de New-York, renfermait les nouvelles suivantes : « Le train de Puebla vient d’être attaqué par des brigands qui ont pillé les voyageurs et leur ont pris jusqu’à leurs vêtemens ; ils ont emmené six voyageurs et maltraité les autres. — On se propose d’ouvrir à Mexico une exposition internationale. »