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influent sur l’extension des chemins de fer. Il est préférable de s’en tenir, pour tracer une comparaison rationnelle, au rapport qui existe entre la longueur du réseau et le chiffre de la population. D’après ce calcul, la Grande-Bretagne compte 826 kilomètres par million d’habitans ; la Belgique, 623 ; la Suisse, 550 ; l’Allemagne, 452. Vient ensuite la France avec 444 kilomètres. Disons tout de suite que la supériorité de l’Allemagne sur la France est due aux nombreux tronçons que chacun des petits états avait fait construire sur son territoire avant l’annexion à la Prusse. Quant à l’ancienne Prusse, elle ne comptait à la fin de 1869 que 9,946 kilomètres en exploitation, soit 414 par million d’habitans. Chaque état voulant avoir son réseau national, les petits pays avaient construit des voies ferrées qui étaient peu distantes des lignes parallèles du pays voisin, et qu’un grand état se serait abstenu d’établir. Cela explique comment l’Allemagne du sud possède un réseau relativement plus étendu que celui de la France. On voit néanmoins, par les chiffres du tableau comparatif, que notre réseau n’est point ce qu’il devrait être, et que la France n’a pas encore à sa disposition le nombre de kilomètres qui correspond à sa population, à sa richesse agricole, industrielle et commerciale, aux besoins de la défense militaire. Après l’achèvement des chemins de fer concédés et avec l’appoint des chemins d’intérêt local, nous pourrons supporter avantageusement la comparaison avec les pays qui sont aujourd’hui plus avancés que nous. Dans peu d’années sans doute nous serons au pair.

Le régime adopté pour la construction et l’exploitation des chemins de fer varie selon les pays. La Grande-Bretagne, l’Italie, l’Espagne, le Portugal, la Turquie et la Grèce laissent à des compagnies concessionnaires le soin de construire et d’exploiter les voies ferrées. En France, l’état a construit, à l’origine, plusieurs lignes ; mais l’exploitation par les compagnies est demeurée la règle générale. En Belgique, dans les Pays-Bas, en Allemagne, en Autriche, en Russie, en Suède, dans le Danemark et en Suisse, la propriété et la gestion des chemins de fer se partagent entre les compagnies et l’état, et ce sont ordinairement les compagnies qui exploitent la plus grande portion du réseau. Enfin, dans quelques pays tels que l’Allemagne, la Belgique et la Suède, l’état se charge d’exploiter une partie des lignes qui ont été construites par des compagnies et dont celles-ci se conservent la propriété. Chacune de ces combinaisons a sa raison d’être. Lorsque la création du réseau a été déterminée par un intérêt gouvernemental, comme en Belgique après 1830, ou lorsque l’industrie privée n’était pas assez entreprenante ni assez riche pour mettre la première main à l’œuvre de