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ETUDES
SUR
LES TRAVAUX PUBLICS

LES CANAUX ET LES VOIES DE COMMUNICATION AUX ETATS-UNIS

Rapport de mission, par M. Malézieux, ingénieur, en chef des ponts et chaussées, Paris 1873.

Nous avons essayé dernièrement, en prenant la Russie pour exemple, de montrer que les travaux publics révèlent l’état social et la force productive d’une grande nation. Une publication récente d’une rare exactitude nous permet de recommencer cette étude pour une région bien différente. Il s’agit des États-Unis de l’Amérique du Nord, pays favorisé sous le rapport du climat et des productions naturelles, et de plus livré au libre essor d’une race d’hommes entreprenans, au lieu d’être guidé, comme la Russie, par les caprices d’une administration absolue. En général, les renseignemens précis font défaut sur ce qui se fait au-delà de l’Atlantique. On s’en rapporte trop souvent aux récits de touristes qui voient en passant, qui n’ont pas l’instruction et le loisir nécessaires pour approfondir les questions techniques. Les Américains ne se laissent arrêter par aucun obstacle, on les dit empiriques ; ils n’ont pas notre respect invétéré pour la vie humaine, ils évaluent les accidens en dollars et ne se lamentent pas à l’infini ; sur l’écroulement d’un pont ou sur l’explosion d’une machine ai vapeur, on les dit imprudens. La vérité est que dans leurs constructions publiques ils allient une originalité rare à une suprême audace, mais que la science est, pour eux comme pour nous, le critérium définitif des inventions nouvelles leur esprit positif les préserve de ces écarts