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ESSAIS ET NOTICES.

Costumes historiques, des seizième, dix-septième et dix-huitième siècles, dessinés par Lechevallier-Chevignard, avec un texte descriptif par G. Duplessis. Paris 1873.


Un des résultats les plus clairs du mouvement qui s’accomplissait dans notre école, il y a près d’un demi-siècle, est l’habitude prise par les artistes de rechercher la vérité historique, « la couleur locale, » pour parler la langue des ateliers, c’est-à-dire l’exactitude absolue des détails de mœurs et de costume toutes les fois qu’il s’agit de mettre en scène des personnages appartenant aux temps passés. Nous ne prétendons nullement exagérer la valeur de ce progrès : puisqu’il ne concerne que la vraisemblance extérieure et la représentation toute littérale des choses, on ne saurait sans doute l’assimiler à la découverte d’une loi esthétique, d’une forme d’expression nouvelle pour le beau et l’idéal. Ce que nous voulons rappeler seulement, c’est que la fidélité archéologique est devenue pour quiconque peint, sculpte ou dessine, une condition nécessaire du travail. Les apprentis même savent se garder aujourd’hui des anachronismes pittoresques dont les maîtres de tous les pays avaient naïvement multiplié les exemples depuis l’époque de la renaissance jusqu’au siècle où nous vivons. Le public de son côté n’a pas laissé de s’intéresser à ces réformes et de participer à ce mouvement. A mesure que la mode a remis en faveur les objets fabriqués par nos pères, à mesure qu’on a pris à tâche de recueillir les curiosités de toute espèce, ces « vieilleries gothiques, » comme disait Diderot et comme avait dit avant lui La Bruyère, chacun à peu près est arrivé, sinon à une connaissance plus profonde des principes mêmes de l’art, au moins à une certaine expérience pour tout ce qui tient aux variations chronologiques du goût, des usages, de l’industrie. On sait maintenant reconnaître à première vue les produits d’une époque, et depuis que tant d’amateurs ont rempli leurs appartemens de meubles anciens, de vieilles faïences ou de vieux cadres, tel d’entre nous qu’embarrasserait peut-être une question sur quelque événement politique de notre histoire répondra sans hésitation ni méprise, si on l’interroge sur l’âge et les origines d’un bahut, d’une assiette ou d’un miroir.

Restait toutefois à compléter cette éducation des yeux par des informations relatives aux contemporains de ces divers objets, à leur personne même, aux habitudes ou aux caprices dont leurs vêtemens trahissaient aussi l’influence. Certes les documens ne manquaient pas. A partir des premiers temps de la gravure jusqu’à notre siècle, d’innombrables pièces ont été publiées qui déterminent la physionomie d’une époque et en rendent avec précision les moindres traits. Pourtant chaque série ne comprenant que dés scènes ou des figures empruntées au milieu même où vivaient les artistes qui les ont tracées, chacun de ceux-ci n’ayant