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Page:Revue des Deux Mondes - 1873 - tome 106.djvu/434

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sume; mais elle diminue aussi très vite pendant la détente des gaz qui se dilatent en poussant le boulet. Le plus ou moins de rapidité de la combustion doit évidemment exercer une grande influence sur la succession des pressions pendant le centième de seconde que le boulet met à franchir la longueur de l’âme : aussi a-t-on entrepris toute sorte de recherches pour arriver à connaître les conditions qui modifient l’inflammation et la combustion de la poudre de guerre.

Il est clair que la déflagration de toute une charge est un phénomène complexe, où il faut distinguer des effets très divers : d’abord ce qui se passe dans chaque grain pris isolément, ensuite l’influence du contact des grains plus ou moins tassés. Un grain de poudre de tir, gros comme une lentille, brûle à peine un dixième de seconde : c’est un globe de feu qui tout à coup enveloppe le grain, puis s’éteint, sans qu’on puisse voir comment l’ignition se propage. Pour faire durer ce phénomène plus longtemps, on a confectionné tout exprès des grains de 1 et de 2 kilogrammes, et ceux-là n’étaient consumés qu’au bout de plusieurs secondes; néanmoins la flamme les enveloppait toujours en un clin d’œil : tout ce qu’on a pu constater, c’est que la combustion s’opère ensuite par couches assez régulièrement. Avec des prismes découpés dans les galettes de poudre, on a trouvé des vitesses de combustion de 1 à 2 centimètres par seconde. La rapidité avec laquelle la flamme circule dans un tas de poudre grenée est beaucoup plus grande : le feu parcourt plusieurs mètres par seconde le long d’une traînée, et jusqu’à 25 mètres dans les tubes non remplis; ces expériences sont dangereuses, car les canons de fusil éclatent souvent. L’inflammation de la charge d’une arme à feu ne demande donc pas un centième de seconde. Cependant on a pu s’assurer que les poudres légères et à grains fins brûlent plus vite et dégagent plus de gaz que les poudres denses et à gros grains : l’action en est plus soudaine, mais aussi plus fatigante pour l’arme. De plus l’effet de ces poudres s’épuise plus vite que celui de la grosse poudre à canon, qui fait long feu, agit sur le boulet d’une manière plus soutenue, et produit finalement le même effet, tout en étant beaucoup moins offensive contre la culasse. Les pressions initiales trop brusques fatiguent l’âme sans nécessité, puisqu’il est possible d’imprimer au projectile la même vitesse par une impulsion graduelle et progressive : elles n’ont un avantage marqué que dans les armes courtes, où il faut se hâter d’agir sur le projectile avant qu’il ne quitte le canon. C’est pour ces raisons que le coton-poudre et les autres agens explosifs à effet brusque n’ont pas amené une révolution dans la construction des armes à feu. La forme de la charge contribue encore à ré-