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Page:Revue des Deux Mondes - 1873 - tome 108.djvu/245

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L’ESPAGNE POLITIQUE

TROISIEME PARTIE[1]

LES COMMENCEMENS DE LA REPUBLIQUE ESPAGNOLE.


I

Il est des enfans qui naissent sous de tristes auspices, la nature comme la fortune les a maltraités. Ils sont condamnés à une existence tourmentée, souffreteuse, et menacés d’une fin précoce. Cependant ils ne laissent pas de vivre ; — on peut appeler de toutes les sentences, à la condition de joindre l’esprit de conduite au courage ; et à la foi dans l’avenir.

On ne peut nier que la république espagnole ne soit venue au monde. dans de fâcheuses conjonctures. Tout paraissait lui être contraire ; les fées qui ont présidé à sa naissance semblaient avoir maudit son berceau. L’une lui avait dit : ton état civil sera un imbroglio suspect que tu auras grand’peine à débrouiller. Une autre l’avait dotée d’ennemis dangereux, une troisième d’amitiés compromettantes. Une quatrième, brochant sur le tout, lui annonça que le monde la traiterait en enfant trouvé, ramassé au coin d’une borne, et se refuserait obstinément à reconnaître sa légitimité. Toutes ces prédictions se sont accomplies, car les fées ne mentent point. La pauvre fille a vu deux pères revendiquer l’honneur de lui avoir donné le jour, et peu s’en est fallu qu’elle n’ait péri victime de

  1. Voyez la Revue du 1er septembre et du 1er octobre.