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a entreprise ; sa politique a trouvé une sanction de plus dans les élections dernières, et il sera certainement soutenu par son parlement. C’est là l’intérêt de cette session nouvelle qui vient de s’ouvrir, et puisque M. de Bismarck n’aura plus à s’armer, à nouer des alliances contre la monarchie en France, il bataillera contre les évêques et les prêtres !

Cette malheureuse monarchie, un moment apparue à l’horizon, était devenue en vérité un fantôme pour bien des esprits en Europe. Le fan-tôme s’est évanoui, et s’il est un pays où, ce moment de trouble passé, la politique doive revenir à ses traditions naturelles, c’est l’Italie. Là aussi le parlement vient de s’ouvrir, et le discours par lequel le roi Victor-Emmanuel a inauguré la session nouvelle laisse percer ce sentiment légitime de satisfaction d’un souverain qui voit ses espérances comblées, qui, après être arrivé à ouvrir le parlement à Rome, n’a plus à demander pour son pays que le respect de son indépendance reconquise, un avenir garanti par la paix, par le développement de toutes les ressources nationales, L’ItaUe est trop pratique pour se jeter dans les vastes combinaisons et même dans les guerres religieuses où M, de Bismarck voudrait l’entraîner. Qu’y gagnerait-elle ? Elle irait au-devant de difficultés intérieures qui n’existent pas réellement pour elle. Elle compliquerait, elle aggraverait et elle finirait par compromettre sans motif une situation qu’elle s’est appliquée jusqu’ici à pallier par un esprit de libéralisme et de modération. Elle a bien assez à faire chez elle. La plus grave question faite pour l’occuper est celle de ses finances, dont le président du conseil, M. Minghetti, vient de résumer les conditions dans un savant et lumineux exposé qui complète le discours du roi, qui l’accentue même dans le sens pacifique.

Que le roi Victor-Emmanuel, qui ne parle dans sa harangue ni de la France, ni de l’Angleterre, ni de la Russie, ait cru devoir parler d’une façon particulière de l’Autriche et de l’Allemagne en rappelant le voyage qu’il a fait cet été à Vienne et à Berlin, ce n’est point assurément le signe d’une politique engagée dans des alliances compromettantes. L’Italie, quoi qu’on en dise, n’est pas plus liée aujourd’hui avec l’Allemagne qu’elle ne l’était il y a un an, ou, si l’on veut, elle est liée au même degré, c’est-à-dire que, si elle se sent menacée, elle est invinciblement portée à chercher des appuis ; si elle se sent respectée dans son existence nationale, elle va naturellement là où ses sympathies et ses intérêts l’appellent. C’est au nouveau ministre français des affaires étrangères de s’inspirer de cette situation, et de bien comprendre qu’il n’y a qu’à le vouloir pour que la France ait à Rome et en Italie la place privilégiée qu’elle doit avoir. Il paraît s’en être occupé dès les premiers momens, et, si M. Fournier ne doit pas revenir à Rome, il serait remplacé, dit-on, par un homme dont le nom serait certainement le gage des dispositions les plus franches, les plus sympathiques. Le nouveau re-