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répond de l’ordre public pour sept ans, avec le titre maintenu de président de la république, après quoi les pouvoirs constitutionnels existans ou le pays lui-même directement consulté sur cette grande question aviseront à fonder un gouvernement définitif. Que voulez-vous de plus ? Le présent vous est assuré, et pour l’avenir c’est le pays qui décidera. » Il ne nous en coûte pas de convenir que, dans cette manière d’entendre le septennat, c’est encore le parti républicain qui a la meilleure part. Dans sa sagesse et sa modération, ce parti pourrait peut-être accepter un tel état de choses sans insister sur la proclamation de la république, et même sans chicaner sur la clause d’une révision, quelle qu’en soit la formule. Quant au commentaire ajouté au texte de la loi par les organes les plus autorisés du septennat, par M. de Broglie notamment, qui n’a jamais laissé échapper l’occasion de déclarer qu’en instituant le septennat l’assemblée avait simplement voulu prolonger de sept ans la trêve de Bordeaux, le parti républicain le trouve peu conforme à ses légitimes prétentions et par parenthèse en contradiction avec le titre même de ce gouvernement ; mais, comme c’est en définitive le pays qui sera le juge du sens et de la portée de la révision constitutionnelle, il n’a pas trop lieu de s’en inquiéter.

Ce qui a donc provoqué la proposition Perier, c’est beaucoup moins la chose elle-même que l’effet qu’elle produit sur le pays. Le pays comprend un gouvernement défini par un nom qui est république, empire ou royauté ; il ne comprend pas un gouvernement sans nom comme le septennat. A ceux qui disent que le septennat a un titre, et que ce titre est république, on répond que ce titre est illusoire, puisqu’on en est toujours à ce pacte de Bordeaux qui réserve la grande question de la forme du gouvernement. Une trêve de quelques mois se comprend dans une situation comme celle que la France a traversée après la guerre. Une trêve de sept ans semble au pays une invention bizarre qui n’a jamais eu d’analogue dans aucun pays ni dans aucun temps. Franchement le pays a-t-il tort de penser ainsi ? Est-il sensé, est-il possible d’espérer des partis pour une trêve à aussi long terme la même patience, la même abnégation que pour une courte trêve, commençant et finissant avec la crise qui l’a rendue nécessaire ? M. de Broglie et ses amis de l’ancienne majorité trouvent-ils que l’expérience qui en a été faite jusqu’ici est heureuse, qu’elle a donné au pays ce calme, cette sécurité, cette confiance dont il a tant besoin ? Ils avaient rêvé sans doute dans le septennat un temple élevé à la concorde, où tous les partis désarmés seraient venus, la main dans la main, saluer l’auguste image de la patrie encore sanglante. Beau rêve, mais quelle réalité ! Demandez-le aux légitimistes ardens, qui poursuivent le septennat et ses auteurs de leurs amères récriminations. Demandez-le aux