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vieil alphabet phénicien pour se convaincre qu’elles s’en sont dérivées à l’époque où cet alphabet commençait à passer à un second type ; mais les caractères araméens eux-mêmes se modifièrent graduellement, comme le prouvent des monnaies de Cilicie, de Cappadoce, d’Hiérapolis de Syrie et diverses inscriptions ; il en résulta une écriture que l’on a appelée l’araméen secondaire, et cette écriture sur les papyrus subit une autre modification qui se retrouve dans certaines inscriptions. C’est pendant cette seconde phase de l’écriture araméenne que se manifeste pour la première fois une tendance à laquelle se reconnaissent la plupart des écritures nées des dérivations postérieures, la tendance à lier les lettres entre elles. « Cette disposition, remarque M. François Lenormant, tient à la nature essentiellement cursive de l’écriture, et, avant de devenir une règle d’enjolivemens calligraphiques, elle est d’abord le résultat de la facilité avec laquelle le pinceau ou le calame, glissant sur le papyrus, passe sans que le scribe ait besoin de s’y reprendre à chaque fois du tracé d’une lettre à celui d’une autre. » La troisième phase de l’alphabet araméen nous est offerte par un alphabet à traits épais et carrés que l’on trouve employé sur les monumens de Palmyre. De là le nom de palmyrénien qui lui a été donné. Comparé à l’araméen précédent, cet alphabet s’en distingue surtout par certaines fioritures, certaines formes finales. Les monnaies de la ville de Sidé en Pamphylie nous présentent encore une autre variété d’alphabet qui doit être rattachée au type araméen par le palmyrénien, et qui prend la tête d’un ensemble de générations ayant pour ancêtre l’araméen sous sa troisième manière. À cette postérité appartient l’alphabet auranitique, que nous fournissent des inscriptions découvertes dans le Haouran par deux savans voyageurs, devenus aujourd’hui deux hommes politiques distingués, M. H. Waddington et M. le comte Melchior de Vogué. L’une de ces inscriptions, celle du tombeau de Souéideh, où la traduction grecque accompagne le texte, doit être rapportée, si l’on en juge par le style, à l’époque d’Hérode le Grand. Elle a donné la clé de l’alphabet, qui n’est qu’une dégénérescence du palmyrénien. Dans la même catégorie que l’auranitique se classent l’alphabet sabien et l’alphabet estranghelo, le plus ancien de ceux qu’offrent les manuscrits syriaques. L’auranitique engendra le nabatéen, dont les caractères ont servi à composer les nombreuses inscriptions découvertes au Sinaï, et c’est de cet alphabet nabatéen que paraît être sorti l’alphabet arabe, dont il existe deux variétés : l’une, encore aujourd’hui en usage dans les manuscrits, est dite neskhy ou écriture des copistes, l’autre se nomme koufy, d’une ville de l’Irak appelée Koufa, où, suivant la tradition, on commença à s’en servir. Sous la forme lapidaire, où les traits