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plénipotentiaires qui partent pour le Japon ; ces dignitaires mettent le plus louable empressement à s’informer de l’industrie séricole, ils promettent des montagnes de documens, puis, une fois partis, ils ne donnent plus signe de vie. A qui la faute ? Au public d’abord, qui ne lit pas les travaux des consuls dans les Annales du commerce extérieur, peut-être aussi à la forme de cette publication savante et compassée qui, pour être mieux mûrie, manque souvent d’opportunité. Les recueils consulaires d’Angleterre et de Belgique offrent le modèle de publications plus courantes, plus personnelles, plus rapides. Chez nous, les qualités propres des consuls disparaissent dans la grande machine administrative, qui absorbe leurs travaux, les digère, les transforme, les fait passer par une série de laminoirs, et restitue enfin au public une poussière impalpable, dépourvue de saveur et d’originalité. Pourtant rien n’est plus franc, plus ouvert, plus abordable, plus dégagé des préjugés nationaux, qu’un consul intelligent qui a quelques années de résidence. Que les consuls et les commerçans n’apportent pas les mêmes vues sur le sol étranger, c’est inévitable et c’est fort heureux ; mais ils sont destinés à s’appuyer mutuellement, et il faut dissiper tout malentendu soit en groupant les négocians autour des consuls, soit en simplifiant la filière administrative qui met ces derniers en rapport avec le commerce de la métropole.

L’essentiel est de changer l’esprit de cette petite armée répandue sur le monde. Généralement ceux qui en parlent ne la connaissent guère. L’état-major se compose de consuls proprement dits ou consuls de carrière, formés avec soin par la métropole, tenus prudemment à l’écart de toute opération lucrative : s’ils mettaient la main à la pâte, leur fonction, leur dignité, leur influence, passeraient au compte des profits et pertes. Au lieu de protéger, ils combattraient pour leur compte. Les pays voisins ont trouvé la règle si bonne qu’ils l’ont adoptée. Nous avons seulement cent vingt postes de consuls dans le monde entier. Ceux-ci désignent et dirigent une légion d’agens consulaires d’importance et d’origine diverses. Non-seulement les fonctions subalternes ne sont pas interdites aux négocians, mais on choisit de préférence comme agens, dans les petites places, des négocians du pays. Ces consuls au petit pied, tout fiers de leurs maigres attributions, usurpent volontiers un titre qui n’appartient qu’à leurs chefs. De là plus d’un reproche injustement adressé au corps tout entier, et réellement mérité par un agent inférieur. Le véritable inconvénient du système gît dans le mode de recrutement de l’état-major. Il se forme d’abord à Paris, au ministère des affaires étrangères, ce qui n’est pas la meilleure manière de connaître les débouchés commerciaux. Ce département fournit à lui seul le cadre des élèves consuls, précieuse pépinière qu’on transplante du quai