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L’ÂGE DORÉ
EN AMÉRIQUE

The Gilded Age, by Mark Twain and C. Dudley Warner, London 1874.


I.

À propos du livre curieux de M. Hepworth Dixon sur la Nouvelle-Amérique, un critique autorisé exprimait ici même le désir qu’il surgît de temps à autre des observateurs capables de discerner l’heure à l’horloge invisible qui marque la vie des différentes nations et de nous la sonner[1]. Les auteurs du Gilded Age ont réalisé ce vœu dans une certaine mesure ; assurément ils sont loin de la hauteur de vues, de l’exquise pénétration, du charme plein de finesse, qui distinguent le talent de M. Dixon ; ils ne savent pas, comme lui, remonter de l’effet aux causes les plus secrètes, ils ne prétendent point laisser à la postérité un monument d’histoire ou de philosophie ; c’est sans beaucoup d’art qu’ils nous présentent sous forme de roman le daguerréotype brutal de la société qui les entoure, société dévorée par la soif des richesses soudaines et la fièvre de l’aventure, tandis que la plus honteuse corruption en matière politique mine ses fondemens sur tous les points. Assez d’enthousiastes ont chanté l’âge d’or du Nouveau-Monde, le temps où Washington se retirait les mains vides dans son humble foyer, après avoir remis

  1. Voyez dans la Revue du 1er  mai 1868 la Vie sociale en Amérique, par M. Émile Montégut.