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Sambre, se présentaient dans de bonnes conditions à l’état naturel; les ouvrages exécutés pour les assouplir à la navigation n’ont été ni coûteux ni difficiles, parce qu’elles ont des pentes modérées, et que l’écart entre l’étiage et les crues n’est jamais excessif.

La Marne et le canal de la Marne au Rhin établissent une communication fluviale continue entre Paris et Strasbourg; c’est la dernière des grandes œuvres de ce genre que l’on ait exécutée en France. Le trafic restreint qu’elle reçoit prouve assez que cette ligne est loin d’être parfaite. La Marne est en effet un cours d’eau capricieux, puisque le débit des hautes eaux est de cent à cent vingt fois plus considérable que celui de l’étiage. Ici se manifeste le tort que l’on a souvent eu d’entreprendre une canalisation sans un plan bien arrêté. Cette rivière avait de tout temps rendu de grands services pour l’approvisionnement de Paris : les ingénieurs eurent d’abord à en améliorer les passages les plus défectueux. Une fois commencés, les travaux se poursuivirent; tout compte fait, la Marne a coûté presque autant qu’un canal latéral sans que le résultat soit aussi satisfaisant à beaucoup près. On reproche de plus au canal de la Marne au Rhin de n’avoir qu’un mouillage de 1 m,50, ce qui ne suffit pas aux besoins actuels de la batellerie, en sorte que cette longue ligne de navigation, soumise d’ailleurs à la concurrence d’un chemin de fer parallèle, est loin d’avoir le trafic que sa situation géographique semblait lui promettre.

Il y a peu de chose à dire des canaux de Briare, du Loing et d’Orléans, qui forment la jonction entre la Seine et la Loire, car, fussent-ils en meilleur état d’entretien, ils auraient encore l’inconvénient de déboucher dans la Loire, où la batellerie est réduite à l’impuissance par les défauts naturels de ce fleuve. Ils ne desservent donc que des intérêts locaux, et cependant le tonnage d’environ 300,000 tonnes qu’ils reçoivent prouve encore combien les canaux sont utiles dans cette partie de la France, au milieu d’un pays agricole dont les marchés de la capitale attirent toutes les productions. Aussi M. Krantz recommande~t-il avec raison l’ouverture d’un canal de ceinture qui contournerait Paris à 30 ou 40 lieues de distance dans la zone géologique de nature argileuse que M. Belgrand appelle la Champagne humide, et réunirait de Chauny à Orléans, par Reims, Vitry-le-Français, Troyes et Joigny, les canaux de Saint-Quentin, des Ardennes, de la Marne au Rhin et de Bourgogne. Une fois la Loire rendue navigable, cette nouvelle voie formerait l’un des tronçons de la ligne de Nantes à Strasbourg.

Passons dans le bassin de la Loire, qui nourrit, qu’on y fasse attention, un cinquième des habitans de la France. Par l’étendue de son cours, par sa situation géographique au cœur de notre pays, par