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Page:Revue des Deux Mondes - 1875 - tome 9.djvu/220

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gouvernement sensé et honnête, l’aidant à franchir sans secousse cette période de transition.

Que les partis déçus s’agitent encore, s’efforçant de ramener le pays à ses incertitudes d’hier et mettant leur dernière espérance dans quelque crise nouvelle, ils obéissent à la logique de leurs passions ou de leurs préjugés. Si tous ceux qui ont contribué au vote du 25 février ont un peu de prévoyance ou même de sollicitude de leur œuvre, ils resteront certainement unis ; ils mettront tout ce qu’ils ont d’esprit de conciliation et de zèle à éviter les difficultés ; ils laisseront surtout au ministère qui existe aujourd’hui le soin de conduire jusqu’au bout cette expérience de la première application du régime nouveau. C’est leur intérêt, et c’est aussi un sentiment qui paraît dominer toutes les opinions modérées aux approches de la session décisive près de se rouvrir à Versailles. Le mieux serait de s’interdire les interpellations irritantes, les discussions inutiles, de s’en tenir aux lois strictement nécessaires.

Il faudra bien toujours sans doute trancher la question du régime électoral, se prononcer entre le scrutin de liste et le scrutin par arrondissement. Ceci, on ne peut l’éviter, et il y a, ce nous semble, des esprits bien prompts à se décider par une sorte de tradition ou par un calcul peu sûr pour le scrutin de liste. Ces esprits ne prennent pas garde qu’en croyant mieux combattre ainsi les bonapartistes ils vont tout droit à des élections plus ou moins plébiscitaires qui peuvent être une arme aux mains de ces ennemis mêmes contre lesquels ils prétendent se prémunir. C’est dans tous les cas une de ces questions qu’on ne peut résoudre par des considérations accidentelles ou locales, sous peine d’avouer qu’on suit une politique de circonstance, ce qui n’est pas la meilleure manière d’accréditer et d’affermir un régime nouveau. Reste la loi sur la presse, qui paraît rentrer aussi dans le programme des propositions dont l’assemblée doit être saisie à son retour. Une commission consultative a été réunie par M. le garde des sceaux pour préparer un projet. Qu’en sera-t-il cette fois du travail de la commission appelée en consultation par M. Dufaure ? En vérité, nous nous demandons pourquoi la presse est toujours la première à solliciter des réformes de législation. Les assemblées ne songent guère à elle que pour lui imposer des restrictions ou des charges nouvelles, toutes les fois qu’on s’occupe de ses affaires, il y a de quoi s’inquiéter. Des lois sur la presse, il y en a déjà de toute sorte, il y en a de toutes les dates, de tous les régimes, et les meilleures encore, les plus équitables, les plus libérales, sont celles qui remontent à 1819, qui ont été léguées par la restauration. Une loi nouvelle est-elle donc nécessaire aujourd’hui ? La question se lie à la levée de l’état de siège, dit-on ; c’est possible, mais on nous permettra d’ajouter que ce qui est présenté comme une explication n’est à nos yeux qu’une sorte de rappel douloureux aux