recommande souvent l’examen de conscience, et en insistant sur la nécessité de le bien faire, en se moquant de ceux qui le font mal, il laisse voir que le précepte était fort connu, s’il n’était pas toujours bien pratiqué. Plus d’une fois il cite le passage des Vers d’or ou bien il se contente d’y faire allusion comme à une prescription dont il suffit de donner les premiers mots pour la faire aussitôt reconnaître. Ces vers, dit-il, il faut les retenir pour les mettre en pratique et non pour les débiter comme une formule consacrée dont on ignore le sens. Bien plus, dans une spirituelle parodie, il nous fait assister à l’examen de conscience du courtisan qui s’est proposé un idéal de bassesse comme un honnête homme se propose un idéal de vertu, qui s’interroge et se gourmande lui-même en voyant que son âme n’est point parfaite encore, c’est-à-dire entièrement conforme aux lois de la servilité. « C’est à cela, dit Épictète, à cela que notre homme applique le précepte de Pythagore. Qu’ai-je omis, se dit-il, en fait de flatterie ? Aurais-je par hasard agi en homme indépendant, en homme de cœur ? Et s’il se trouve qu’il s’est conduit de la sorte, il se le reproche, il s’en accuse. Qu’avais-tu besoin de parler ainsi ? se dit-il, ne pouvais-tu pas mentir ? » Cet examen est d’autant plus risible que notre homme emploie dévotement les expressions mêmes des Vers d’or : parodie bien piquante, mais qui n’eût pas été comprise, si cette peinture d’un examen de conscience fait à rebours n’avait été une allusion à un usage très connu.
Enfin il nous reste de l’antiquité un admirable examen de conscience, c’est le livre des Pensées de Marc-Aurèle. En le lisant, on assiste aux gronderies que se fait l’empereur philosophe, aux encouragemens qu’il se donne à toute heure, le matin dans son lit, au spectacle, au milieu de sa cour, dans les camps en présence de l’ennemi. Il se redit sans cesse sous une forme ou sous une autre : « Regarde au dedans de toi ; c’est en toi qu’est la source du bien, une source intarissable, pourvu que tu fouilles toujours. — L’âme se voit elle-même, elle se façonne, elle se fait comme elle veut être. — Quel est l’usage que je fais aujourd’hui de mon âme ? Voilà la question que je dois m’adresser à moi-même en toute occasion. » C’est en pratiquant ces maximes sans relâche que Marc-Aurèle nous a laissé non-seulement la peinture de ses nobles scrupules d’homme et de souverain, mais encore la preuve la plus éclatante de l’importance que le précepte pythagoricien avait prise dans l’école stoïcienne.
Le précepte célébré et pratiqué, nous venons de le voir, par les philosophes du portique finit par passer dans l’école platonicienne, où il fut dogmatiquement expliqué avec un subtil enthousiasme. Au Ve siècle de notre ère, Hiéroclès, dans Alexandrie, prit pour sujet de