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Page:Revue des Deux Mondes - 1875 - tome 9.djvu/459

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du soleil y créent, le jour, une chaleur étouffante ; la nuit, cette vallée de l’Habra se remplit de brumes froides émanées du lit de la rivière, et qui accusent d’une manière palpable la stagnation de l’air. Bien qu’on s’empressât de lever le camp, l’hôpital de Mascara fut bientôt tellement encombré de malades qu’il fallut installer une ambulance spéciale pour les cholériques sur un plateau aéré à 2 kilomètres de la ville. On parvint à en sauver la moitié ; vers la fin de septembre, l’épidémie disparut spontanément comme elle était née.

La côte orientale de l’Espagne doit être rangée parmi les zones où se révèle le mieux cette intime connexité des causes climatériques générales et des endémies. Les chaînes qui abritent le littoral, du cap de Tarifa aux Pyrénées, y créent des bassins à température presque tropicale, de véritables serres chaudes où viennent très bien les palmiers et la canne à sucre. Cette zone méditerranéenne est dans tout son parcours un long foyer d’endémie ; les fièvres y règnent habituellement avec plus ou moins d’intensité, et, lorsque des circonstances météorologiques particulières viennent s’ajouter à ces dispositions locales, on voit surgir des calamités comme la terrible épidémie de fièvre jaune qui a décimé la population de Barcelone en 1821. Barcelone est située dans une gorge basse fermée de trois côtés par de hautes montagnes et ouverte seulement à l’est, du côté de la mer ; or pendant l’épidémie de 1821 les vents, presque toujours très faibles, ont constamment soufflé du sud. Ici encore on peut signaler des exceptions qui confirment la règle. Quand la fièvre jaune éclatait en 1828 à Gibraltar, qui est abrité derrière un rocher de 1,300 pieds de haut contre les vents du large, la ville voisine de Tarifa, malgré l’état fâcheux de ses égouts, fut épargnée, grâce à l’active ventilation qu’y produisent en tout temps les brises qui viennent de la mer.

Les exemples de l’insalubrité.des lieux encaissés abondent ; l’Algérie malheureusement en fournit beaucoup. La garantie d’une situation sanitaire favorable, c’est, selon M. Pauly, la hauteur relative, ou le fait de ne pas être dominé par les localités immédiatement voisines. C’est la condition indispensable du libre essor des vents. Cette hauteur relative qui garantit l’immunité contre les endémies causées par des miasmes n’a nullement besoin d’être accompagnée d’une hauteur absolue considérable. Les archipels polynésiens et australiens nous présentent une foule de terres basses à fleur d’eau dont la salubrité est merveilleuse parce que les vents alizés ou les vents généraux d’ouest y règnent presque chaque jour de l’année. Ces îles ont souvent des montagnes centrales, mais ces montagnes n’arrêtent point le jeu des vents, qui ont dans les mers du sud une puissance remarquable. Les plaines de la Plata et du Paraguay, si célèbres par leur salubrité, ne s’élèvent qu’à une faible hauteur au-dessus du niveau de la mer, mais dans ces