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Page:Revue des Deux Mondes - 1875 - tome 9.djvu/650

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au travers des torrens des barrages, dont on consolide ensuite les berges au moyen de plantations. « L’efficacité de ces travaux, aussi simples qu’économiques, dit l’un de ces rapports, est remarquable. Les eaux, retenues de toutes parts dans leur chute, se précipitent avec beaucoup moins de violence et de rapidité ; une grande partie des matériaux qu’elles entraînent se trouve arrêtée derrière les barrages, et l’accumulation de ces matériaux, jointe à l’active végétation des boutures, tend à faire disparaître les effets du ravinement entre les barrages successifs et à effacer en quelque sorte le torrent par la suppression des sillons ramifiés dont il se compose. »

« Les pluies diluviennes, dit un autre de ces rapports, tombées pendant le mois de septembre 1866 dans l’Auvergne, le Vivarais et la Savoie, ont transformé presque instantanément les plus minces ruisseaux en torrens furieux ; partout où les montagnes étaient dénudées, les ponts ont été emportés, les vallées couvertes de déjections ; partout au contraire où des barrages avaient été entrepris, les terres ont été maintenues sur les pentes et les plaines à l’abri des ensablemens. »

Nous voyons dans le compte-rendu des travaux faits en 1868 un autre exemple qui mérite d’être cité ; c’est celui du torrent de Sainte-Marthe dans les Hautes-Alpes. « Tout se trouve réuni dans ce torrent pour y produire les effets les plus connus des torrens des Alpes. Le bassin de réception, entièrement dénudé, forme un entonnoir dans lequel les eaux, au moment des orages, se concentrent presque immédiatement. Cette masse d’eau, se précipitant sur les pentes rapides du thalweg, arrachait d’abord aux flancs des berges supérieures des quantités considérables de pierres et de blocs de toute dimension. Plus bas, le tout se mélangeait à des laves noires fournies par l’effondrement des berges inférieures, et cette espèce d’avalanche, se précipitant avec une violence à laquelle rien ne pouvait résister, venait déboucher dans le fond de la vallée à l’extrémité de la gorge qui forme le sommet du cône de déjection. Les plus belles propriétés des environs d’Embrun, d’une valeur d’au moins 300,000 francs, une route impériale avec un pont et des digues appartenant à l’état d’une valeur de plus de 200,000 francs, un chemin vicinal de grande communication, tout était menacé de destruction. C’est dans ces circonstances que le torrent de Sainte-Marthe a été attaqué en 1865 ; on y a établi 200 petits barrages, dont on a consolidé les berges avec des plantations, si bien qu’aujourd’hui le torrent est éteint et que les plus forts orages peuvent s’abattre sur le bassin sans produire d’autres effets que de gonfler les eaux, mais sans entraîner aucune matière. »

En présence de semblables résultats qui se produisent journellement, les populations, qui dans l’origine s’étaient montrées très