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embarrassé de le dire. Si nous cherchons à nous éclairer des résultats de l’enquête, l’hésitation n’est pas moindre. Les conseils-généraux, les conseils d’arrondissement, les sociétés d’agriculture, les sociétés médicales elles-mêmes, Ont été fort divisés dans leurs appréciations. En 1866, l’Association générale des médecins de France chargea une commission d’étudier la question de l’assistance médicale des indigens dans les campagnes. Elle voulut avoir l’avis des sociétés locales, alors au nombre de 95. Chargé de faire connaître à l’assemblée générale l’opinion de ces sociétés, le rapporteur, M. Barrier, s’exprimait ainsi : « Aucune des opinions émises ne peut invoquer en théorie la valeur souveraine d’une raison qui s’impose, ni en pratique la sanction d’une expérience générale. Le même système qui dans tel département fonctionne à la satisfaction de tous est dans tel autre décrié ou abandonné. Ici je vois la réglementation administrative acceptée sans opposition ; là elle est repoussée comme une source d’abus, comme contraire à la dignité médicale, aux droits et aux intérêts du pauvre. Si quelques sociétés s’inspirent d’un sentiment de respect pour la liberté du malade indigent et pour le maintien d’une loyale égalité entre tous les membres du corps médical, d’autres jugent ces visées plus généreuses que pratiques et y aperçoivent les chimères d’une utopie. » Au fond, il est facile de se rendre compte de la divergence de ces appréciations. Les sociétés médicales voient les systèmes à l’œuvre ; elles les vantent là où ils ont réussi, elles les repoussent là où ils ont échoué. N’est-ce pas le vrai terrain sur lequel on doit se placer ? Un système d’assistance ne doit être jugé que sur les services qu’il rend. Les combinaisons les plus ingénieuses ne sont pas toujours les plus. pratiques, et le mieux est parfois l’ennemi du bien. Est-il rien de moins rationnel, de moins équitable au fond que les abonnemens, que les traités à forfait ? Cependant c’est une combinaison qui entre de plus en plus dans nos mœurs. La simplicité du mécanisme et celle de la comptabilité sont bien aussi des avantages à considérer.

Sans doute le système cantonal est critiquable sur plusieurs points, mais le plus grave défaut qu’on puisse reprocher à ce système tient uniquement à la façon dont il a été appliqué chez nous. Si le traitement des médecins cantonaux a toujours été insuffisant, cela vient de ce que les ressources de l’assistance, n’étant pas garanties par la loi, ont toujours été beaucoup trop faibles. Quel que soit le système adopté, il faudra bien aviser à les asseoir sur une base plus large. Quant à l’objection tirée de l’impossibilité où est le malade de choisir son médecin, nous avouons qu’elle ne nous paraît pas très grave. Dans les hôpitaux, dans toutes les administrations publiques, les médecins sont imposés aux malades ; ceux-ci s’en