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se ressent des influences de la saison. Pourquoi ne se réserverait-elle pas une dernière session au mois de novembre ? alors elle terminerait décidément son œuvre, et, comme la crise de transition troublerait le commerce à la fin de l’année, elle serait ajournée au printemps suivant. Tout s’arrangerait ainsi, et pour le moment, après avoir fait ce qu’on pourrait, on commencerait par prendre des vacances nouvelles au mois de juillet. On irait comme l’an passé réfléchir sous les « frais ombrages, » faire les récoltes, se retremper aux eaux de la mer ou des Pyrénées, mêler un peu de propagande aux travaux des conseils-généraux. — Ces insinuations aimables ne laissaient peut-être pas de toucher ceux qui avaient à faire le chemin de Versailles sous les chaleurs orageuses de ces jours derniers ; ils devaient arriver à la galerie des tombeaux en s’essuyant le front et tout disposés à écouter de si flatteuses propositions.

D’un autre côté cependant, il est bien clair qu’il y a une nécessité des choses qui pèse sur tout le monde, qui déjoue ces tactiques de l’atermoiement. Il y a partout une sorte de besoin intime d’en finir, d’entrer dans l’ordre constitutionnel qui a été adopté, de ne pas laisser le pays plus longtemps dans l’incertitude, en présence d’une organisation politique incomplète ou inappliquée. Les partis eux-mêmes se sentent au bout de leur diplomatie et se résignent visiblement à une épreuve qu’ils ne peuvent plus détourner. Les divers groupes parlementaires cherchent à s’entendre sur les candidatures sénatoriales qu’ils essaieront de faire triompher ; ils se préparent à cette élection de 75 sénateurs qui doit être le dernier acte de souveraineté de l’assemblée, le prélude immédiat de l’application définitive du nouveau régime constitutionnel. La commission des trente, plus expéditive que celle de l’an passé, hâte ses travaux. Elle a déjà terminé l’examen de deux des principales lois qui lui ont été soumises, et elle a d’actifs rapporteurs qui mènent rondement la besogne. M. Laboulaye a déposé son rapport sur la loi qui règle les attributions, les relations des pouvoirs publics, et M. Christophle va déposer le sien sur la loi du sénat. La commission du budget à son tour ne perd pas de temps. Son rapporteur, M. Wolowski, se tient prêt. Tout marche donc à la fois et assez rapidement sous cette pression des circonstances que l’assemblée tout entière subit évidemment. Malgré tout ce qu’on peut lui dire, cette chambre, épuisée par quatre années d’une existence laborieuse, par tous les conflits de partis, sent bien qu’elle est au bout de son rôle et de sa mission, qu’elle ne pourrait plus que se débattre en luttes inutiles, et en réalité la question se résout chaque jour d’elle-même par la force des choses, par la lassitude de l’assemblée, par l’empressement des commissions à préparer les lois qui doivent être votées avant l’inévitable dissolution. M. Calmon vient de retirer une proposition qu’il avait faite, il y a un mois, pour régler l’ordre du