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Page:Revue des Deux Mondes - 1876 - tome 15.djvu/413

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montagnes dont les pentes couvertes de végétation servent de refuge aux hommes et aux animaux. Sur les hauteurs, la température est modérée ; dans les plaines, elle est glaciale en hiver en dépit de la latitude, intolérable en été par excès de chaleur. Quelques tribus y végètent dans la plus complète barbarie ; d’autres" sont nomades, vivant tantôt de rapines, tantôt des produits de leurs troupeaux ; puis encore, au fond des vallées, s’abritent des peuplades moins sauvages qui demeurent sédentaires dans des villages et se livrent à l’agriculture. Ainsi, dans un espace de médiocre étendue, on a le spectacle des transitions entre la barbarie primitive et la vie civilisée des villes.

Parmi les nomades, les Apaches et les Comanches sont les plus dignes d’être observés. Endurcis au froid et au chaud, à la faim et à la soif, ils n’ont d’autre industrie que le vol. Sans autres armes que Tare et les flèches, avec une lance et un bouclier, ils parcourent à cheval le désert, se tiennent en embuscade aussi longtemps qu’il le faut, et attaquent leur ennemi à l’improviste. Leur mode de combattre n’a donc rien de chevaleresque. S’ils font des prisonniers, ils les scalpent ou les torturent. Ils sont aujourd’hui les plus fidèles représentans des guerriers que les romanciers américains d’autrefois se sont plu à décrire. Toutefois quelques-uns savent exploiter les mines d’argent situées sur leur territoire ; d’autres entretiennent des troupeaux de moutons, même ils en filent et tissent la laine ; mais leur industrie ne va pas jusqu’à construire des bateaux, bien qu’ils mènent une vie errante à côté de fleuves navigables. La conquête espagnole leur a donné le cheval ; c’est leur unique moyen de transport : ils sont devenus les plus habiles cavaliers qu’il y ait au monde.

Non loin de ces sauvages se trouve une population fixe, agglomérée dans des villes ou forteresses construites en pierres ou, si la pierre manque, en briques séchées au soleil. Les premiers Espagnols qui les visitèrent ont donné à ces Indiens le nom de Pueblos qui leur est resté. D’aussi loin qu’on les connaît, ils. cultivent la terre dont les produits suffisent à leur nourriture, bien qu’ils ne dédaignent pas la chasse et la pêche. Ils sont aussi plus industrieux que les nomades et, quoique pacifiques, savent se défendre contre les attaques de ceux-ci. Pourtant ce sont des gens de même race suivant toute apparence ; ce sont, sous deux aspects différens, les témoins de ce qu’était la population native avant la conquête. L’invasion européenne ne les a du reste presque pas dérangés jusqu’à ce jour. Qu’est-ce que les Espagnols auraient été prendre chez eux ? Dès le XVIe siècle, les compagnons de Fernand Cortez dirigèrent plusieurs expéditions de ce côté, s’imaginant sans doute qu’il y existait des royaumes fantastiques aussi riches que celui de Montézuma. La