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Ce n’est pas seulement une question d’honneur pour le règne du roi Alphonse, c’est une question de sécurité, et l’Espagne aura certainement de quoi payer tout ce qu’elle doit, de quoi tenir ses engagemens, si elle s’attache à une politique sérieuse, qui, en maintenant la paix intérieure, stimule et protège le développement des forces productives, des éléments de richesse accumulés au-delà des Pyrénées.


CH. DE MAZADE.



REVUE SCIENTIFIQUE.

L’AVENIR DE L’ANTHROPOLOGIE.
I. Revue d’Anthropologie. — II. Bibliothèque des Sciences contemporaines : L’Anthropologie, par M. P. Topinard.


Il semble que la science eût dû suivre de tout temps le fameux précepte socratique qui recommande à l’homme de se connaître lui-même, et cependant bien longtemps l’homme s’est ignoré, car la science de l’homme ou l’anthropologie ne date que de quelques années à peine, et l’on ne s’entend pas encore tout à fait sur la définition et les limites de cette science. C’est qu’en effet on peut envisager l’homme à des points de vue bien différens. La peinture et la sculpture en reproduisent les traits, la psychologie analyse son intelligence, l’anatomie décrit ses organes, la physiologie nous montre comment ces organes fonctionnent ; mais ce n’est pas tout et il restait quelque chose à faire. Au milieu des êtres vivans qui l’entourent, l’homme n’est pas un être à part. C’est, lui aussi, un être vivant, qui a avec ses voisins des rapports qu’il faut connaître pour juger sainement non-seulement des différences, mais aussi des analogies. L’homme envisagé comme espèce, telle est, à vrai dire, la seule définition de l’anthropologie.

Cette définition comporte par cela même plusieurs subdivisions dans la science qu’elle définit. Supposons en effet, pour donner plus de clarté à notre affirmation, qu’il s’agisse d’une espèce autre que l’homme, de l’éléphant par exemple. La connaissance de l’espèce éléphant n’impliquera pas l’anatomie descriptive et complète de ses organes. Une telle étude ne serait qu’une monographie de l’éléphant ? mais il faudra connaître et étudier d’abord les caractères qui séparent l’éléphant des animaux voisins, ensuite les variétés de cette espèce : on aura alors à examiner successivement ces variétés suivant le temps, c’est-à-dire aux périodes géologiques où elles ont apparu, pour disparaître plus tard, et suivant les lieux, c’est-à-dire dans les contrées où elles se multiplient, en Asie et en Afrique. L’éléphant d’Asie n’est pas le même que l’éléphant d’Afrique, il faudra donc rechercher s’ils ont la même origine, s’ils dérivent d’une ou de plusieurs souches, quelles migrations les ont