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long et difficile à établir, les démocrates ne voulant pas renoncer au bénéfice électoral qu’ils attendaient des larges amputations imposées au budget. Le sénat obtint le rétablissement de certains crédits, mais il dut, par voie de transaction, consentir à des réductions considérables dans le personnel des diverses administrations et dans l’effectif de la marine. L’armée n’aurait pas été épargnée sans la guerre engagée contre les tribus coalisées des Sioux. La suppression de cinq cents employés a été imposée au service de la trésorerie. Dans le service des relations extérieures, vingt-deux consulats ont été supprimés, et un certain nombre de ministres plénipotentiaires devront être remplacés par de simples chargés d’affaires. Les dernières lois de finances n’ont pas été votées définitivement avant le 10 août. Le général Grant les a sanctionnées immédiatement ; mais, par une intervention tout à fait inusitée, il s’est permis en même temps d’en faire la critique. Il est de règle, lorsque le président ne donne pas sa sanction à une mesure, qu’il fasse connaître aux chambres, par un message spécial, les motifs qui le déterminent à user de son droit de veto ; mais jusqu’ici, quand un bill avait reçu la sanction présidentielle, on se bornait à en donner avis aux deux présidens. Le général Grant a innové sur cet usage : il a adressé à la chambre, au sujet du bill relatif aux travaux publics, un court message pour lui déclarer qu’il avait sanctionné ce bill à cause des dépenses utiles pour lesquelles des crédits y étaient inscrits, mais qu’il ne se tenait pas pour obligé de faire entreprendre des travaux dont l’utilité ne lui serait pas démontrée. C’était donner clairement à entendre que tous les votes qui auraient un caractère purement électoral demeureraient à l’état de lettres mortes, et que l’administration ne se chargerait pas de faire les affaires de ses adversaires. Grand émoi aussitôt parmi les démocrates ; mais qu’y pouvait-on ? S’il est interdit au président de faire la moindre dépense sans autorisation, on ne saurait lui interdire de ne pas faire une dépense autorisée. Les rieurs ont été du côté du président.

Le budget des relations extérieures a été également l’objet d’un message du même genre. Le président, en annonçant qu’il venait de sanctionner le bill, a fait observer aux deux chambres qu’il aurait pu en considérer certaines dispositions comme un empiétement sur la prérogative du pouvoir exécutif. La constitution a donné au président le droit de nommer des ambassadeurs et des ministres plénipotentiaires ; elle lui confie la conduite des relations extérieures et la négociation des traités. Pour rendre l’exécution de cette mission possible, le congrès vote des crédits dont le chef du pouvoir exécutif dispose sous sa responsabilité, selon que l’intérêt