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des charbons au lieu de repartir sur plein lest d’eau ou avec des chargemens incomplets ; les navires qui apportent à Cette des douelles, des bois de construction, etc. sont dans le même cas. Cette pourrait donc aisément exporter en grande quantité les houilles du Gard et de Graissessac, pour lesquelles les distances ne sont que de 142 et de 95 kilomètres respectivement, et dans une certaine mesure aussi celles de l’Aveyron et de la Loire ; mais ici encore il faudrait d’abord abaisser le prix de revient des charbons mis à bord. Il faudrait aussi améliorer le port, et jusqu’à ce jour de sourdes résistances ont paralysé les meilleures intentions.

Après avoir examiné tous les ports de notre littoral, depuis la frontière belge jusqu’à celle de l’Italie, au point de vue des ressources qu’ils offrent pour l’exportation maritime des charbons français, M. de Ruolz étudie dans le plus grand détail l’importation de houilles anglaises qui a lieu par chacun de ces ports, la pénétration de ces houilles à l’intérieur de la France et la concurrence qu’elles font sur nos propres marchés à nos charbons indigènes. La conclusion générale de cette étude consciencieuse et approfondie, c’est, comme nous l’avons déjà dit, que l’exportation maritime de la France pourrait sans difficulté être élevée à 2 millions de tonnes en développant la production des bassins les plus rapprochés de la mer, et notamment celle des bassins de la zone méditerranéenne, qui pourraient employer à l’exportation la presque totalité de l’accroissement éventuel de leur extraction. Au contraire, pour les bassins afférens aux ports de l’Océan, l’accroissement possible de la production dépasse de beaucoup le maximum de l’exportation qui serait utilement praticable par les mêmes ports. Ces bassins pourraient donc employer le surplus à chasser la houille anglaise des marchés du littoral. Mais ici l’on peut se demander si la France est réellement intéressée à repousser complètement le combustible anglais. C’est pour le moins douteux. « En effet, dit M. de Ruolz, dans une large partie de la zone océanienne, nos charbons ne pourraient lutter de prix avec ceux de l’Angleterre qu’au moyen d’une protection à outrance. Or, comme il faut avant tout à notre industrie de la houille à bon marché, quelle qu’en soit l’origine, il y a tout intérêt à favoriser l’entrée et la concurrence des houilles de la Grande-Bretagne sur la zone de notre littoral où la distance de nos bassins houillers rendrait, toutes conditions égales d’ailleurs, la lutte impossible[1]. Il ne faudrait cependant pas arriver jusqu’à une inégalité de traitement qui constituerait une protection en sens

  1. A part même la question des prix de transport, il est difficile de faire concurrence aux charbons anglais pour le chauffage domestique, qui demande des sortes supérieures.