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commissions les observations qu’elle aurait pu traduire immédiatement en amendemens, si, soucieuse de ne pas créer d’embarras au gouvernement et de ne pas ajouter à la longueur déjà excessive des sessions, elle s’est contentée de prendre acte des déclarations ministérielles qui lui promettaient des satisfactions prochaines, c’est qu’elle se montrait fidèle aux sentimens sincèrement conservateurs qui l’animaient et à son rôle de pouvoir modérateur. On sait du reste à quoi se réduisent, dans les temps réguliers, les modifications dont le budget est susceptible : les mêmes besoins nécessitent, tous les ans, les mêmes satisfactions et ramènent les mêmes crédits; c’est à grand’peine que les commissions parlementaires, après un long travail d’épluchage, arrivent à faire subir aux propositions du gouvernement des réductions dont le chiffre total demeure toujours insignifiant par rapport à la masse du budget. Sous la monarchie de juillet, lorsqu’au bout de quelques années les premières ardeurs de l’esprit de parti furent calmées, et lorsque les règles du régime parlementaire furent sûrement établies et fidèlement observées, on ne vit plus de tentatives pour transformer la loi de finances en une arme de guerre contre les institutions ou contre la législation en vigueur; le budget prit le caractère qui lui appartient d’une loi traduisant annuellement en chiffres les besoins des services publics et de laquelle doit être écarté, pour faire l’objet d’actes législatifs spéciaux, tout ce qui n’est pas la conséquence directe de la législation déjà existante et tout ce qui viserait à engager l’avenir par des dispositions permanentes. La discussion du budget devint l’occasion de porter à la tribune l’expression des doléances et des réclamations locales, la ressource des hommes à système qui avaient des utopies à exposer, et, quand l’horizon politique se couvrait de nuages, un expédient pour provoquer des explications de la part du gouvernement. Les questions financières disparaissaient alors, et on assistait à un renouvellement de la discussion de l’adresse. Rien dans ces discussions, qui n’aboutissaient presque jamais à un vote, n’était de nature à porter atteinte aux principes du droit ou aux règles financières que la chambre des pairs avait surtout à cœur de défendre. Le rôle de la chambre haute n’en était pas moins utile et fécond. Celui qui voudra écrire l’histoire financière de notre pays, et qui, après avoir dressé le tableau des modifications successivement apportées dans la rédaction des budgets, dans la tenue des écritures publiques, dans la perception et dans l’emploi des fonds, se reportera aux rapports et aux discours que la chambre des pairs a entendus, reconnaîtra sans peine que la plupart des réformes introduites dans la gestion des deniers publics et presque tous les perfectionnemens apportés à notre mécanisme financier ont