neuf ou dix endroits, et parfois plus. Pour se rendre compte de la petitesse, de l’exiguïté des parcelles ainsi obtenues, il suffit de se rappeler que l’étendue moyenne des terres allouées aux paysans lors de l’émancipation est de 3 à 4 hectares par mâle, et que souvent les paysans n’ayant racheté que le minimum légal, la part de chacun est notablement inférieure. Dans les communes bien peuplées et mal pourvues de terre, ce parcellement du domaine communal aboutit à un fractionnement sans fin, à un véritable émiettement du sol. L’enquête agricole cite des parcelles, dans le gouvernement de Koursk entre autres, qui n’ont que 2 mètres de largeur. Sous le régime de la propriété individuelle, les partages de succession aboutissent rarement à un plus grand morcellement. Grâce à ce fractionnement indéfini, le système départage aujourd’hui en vigueur ajoute ainsi les défauts de l’individualisme, qui morcelle la terre à l’excès, aux défauts da communisme, qui diminue l’attachement au sol et l’énergie du travail.
Les inconvéniens de ce mode d’allotissement sont aussi visibles que nombreux. C’est d’abord que les parcelles éparses qui forment un lot ne constituent point un ensemble se prêtant à une culture rationnelle. C’est ensuite que le paysan, obligé de faire valoir à la fois de minces lopins de terre, situés souvent à plusieurs lieues de distance, dépense une bonne part de son temps et de ses forces en voyages inutiles, à tel point qu’il n’est pas rare de voir des parcelles éloignées entièrement abandonnées de leurs détenteurs. C’est encore que beaucoup de terre est perdue en limites et beaucoup de grain en semence. C’est enfin que ces parcelles emmêlées manquent de libre issue et qu’elles sont fréquemment si étroites qu’elles en deviennent difficiles à labourer ou à herser. Tous ces morceaux de terre incomplets se tiennent mutuellement dans une dépendance fatale à toute initiative individuelle. Les voisins incapables d’agir seuls sont contraints de s’entendre, et l’on arrive à la culture obligée, au flurzwang des Allemands. Pour assurer le droit de pâture de la communauté sur les terres cultivées, les paysans doivent décider d’un commun accord de l’époque où les champs seront ouverts au bétail. On est ainsi conduit par deux chemins différens à remettre au mir le soin de décider du temps, si ce n’est toujours de la nature des travaux. L’égalité dans le partage n’a ainsi entièrement triomphé qu’au détriment de la liberté dans la jouissance. L’excès même du morcellement ramène indirectement à une sorte d’exploitation commune ou du moins simultanée, que des moyens de culture perfectionnés pourraient rendre profitable, mais dont la routine, aujourd’hui régnante, fait une entrave de plus au progrès.
Pour corriger de tels défauts, il faudrait d’abord renoncer à la décevante chimère de lots absolument identiques, et aux pratiques