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il pourrait bien y avoir en effet une diminution des prix, ce serait parce que la richesse publique aurait diminué elle-même

Nous reconnaissons toutefois qu’il y a peut-être une réserve à faire en ce qui concerne les chèques; la provision pour les rembourser est rarement suffisante, et, dans la plupart des cas, les dépôts qui leur servent de base sont employés deux fois, d’abord par la banque qui les a reçus et qui a besoin de les faire valoir, ensuite par le déposant, qui se réserve d’en disposer au moyen du chèque; cela donne lieu à de grands embarras dans les temps de crise et dans les temps ordinaires peut faire croire à plus de capitaux disponibles qu’il n’y en a réellement, par conséquent agir sur les prix.

Mais ce qui n’est pas vrai pour le billet de banque remboursable à vue l’est incontestablement pour le papier-monnaie pur et simple. Ici, il y a une influence directe et artificielle exercée sur les prix. On a pu être très surpris de voir que chez nous, après la guerre de 1870, au lendemain de nos désastres, lorsque rien n’était réparé, que beaucoup de fortunes particulières restaient compromises, le prix des choses en général n’ait pas baissé et se soit maintenu au contraire avec une fermeté que ne justifiaient pas les circonstances. Aujourd’hui encore, — malgré la crise commerciale qui règne en Europe et en Amérique depuis plusieurs années, et qui commence à nous atteindre, si on en juge par le mouvement de notre commeroe d’importation et quelques recettes de chemins de fer qui sont moindres que l’année dernière, — il n’y a rien de changé. Nous ne parlons pas des prix de certains produits manufacturés ou matières premières sur lesquels la crise s’est appesantie tout spécialement, tels que le fer, le coton, la houille, etc., mais de ceux des denrées alimentaires et des choses de luxe, qui peuvent plus exactement servir de critérium, parce qu’elles sont généralement en dehors des crises commerciales. Ces denrées et ces choses de luxe ont plutôt en une tendance à la hausse. Il est impossible de ne pas voir là une influence exercée par l’abondance de l’instrument d’échange.

Il y a en ce moment en circulation 2 milliards l/2 de billets au porteur, et à la banque, pour servir de garantie à ces billets, plus de 2 milliards d’espèces métalliques. C’est évidemment une situation extraordinaire et qu’on peut appeler pléthorique. Les 2 milliards et plus de monnaie métallique font, pour une partie au moins, double emploi avec les 2 milliards 1/2 de billets. Et pourquoi cet état de choses s’est-il produit et se maintient-il? Parce qu’on a le cours forcé et que la banque garde à peu près tout le numéraire qui lui arrive de l’intérieur et du dehors ; elle n’en rend que ce qu’elle veut. Et comme d’autre part le public s’arrange fort bien des billets et les trouve très commodes, personne n’insiste pour m. demander le remboursement, La banque, grâce au cours forcé, est comme un