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Page:Revue des Deux Mondes - 1876 - tome 18.djvu/582

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Paris du moins, en présence d’une organisation puissante, sinon complète, qui comprend à la fois des hôpitaux, des maisons de convalescence et des hospices. Cette étude ne paraîtra peut-être pas complètement inutile, si, tout en rendant justice aux progrès qu’a réalisés l’assistance publique, elle nous amène à quelques conclusions précises sur ceux qu’il lui reste à accomplir encore.


I

Les hôpitaux d’enfans sont une création moderne qui date du XIXe siècle. Il est vrai qu’avant la révolution un grand nombre d’asiles et de refuges étaient ouverts aux enfans pauvres, orphelins, abandonnés. On leur donnait dans ces asiles les soins nécessaires à leur santé, ce qui n’en laissait arriver qu’un petit nombre à l’Hôtel-Dieu, autrefois l’hôpital par excellence. Dans cet hôpital, les enfans ne trouvaient pas un meilleur traitement que les adultes. « En ladicte infirmerie, dit une description de l’Hôtel-Dieu qui remonte au XVIe siècle, il y a sept ou huit licts où se couchent vingt-cinq ou trente petits enfans de deux ans et d’un an, lesquels enfans, qui sont tendres et délicats, à cause du gros air qui est en ladicte infirmerie, meurent tellement que de vingt n’en réchappe pas un. » En 1679, les administrateurs de l’Hôtel-Dieu se plaignaient encore de ce qu’il y avait huit ou neuf enfans couchés dans un même lit. Pareil état de choses fut signalé en 1789 à l’assemblée nationale par la commission qu’elle avait désignée pour constater l’état des hôpitaux à Paris, et dont le rapporteur Tenon nous a transmis des détails si curieux sur notre ancienne organisation hospitalière. Quelques années plus tard, le préfet de la Seine Frochot, dans son discours d’installation du conseil général des hôpitaux, signalait « le mélange, établi depuis longtemps, d’enfans, d’adultes, d’hommes, de femmes, dont les mœurs, le caractère et les habitudes désordonnées triomphent des moyens de discipline et font d’une maison de bienfaisance une maison de scandale. » Les inconvéniens de cette promiscuité, tant au point de vue moral qu’au point de vue hygiénique, avaient été signalés avec trop de force pour que la question, une fois soulevée, ne fût pas résolue dans le sens de la séparation. Restait à trouver l’emplacement. Dans les terrains vagues qui bordaient encore la rue de Sèvres au commencement du siècle, s’élevait une vaste maison que Languet de Gergy, curé de Saint-Sulpice, avait établie pour servir de refuge aux ouvrières sans travail. Ce bâtiment était devenu, depuis la révolution, la propriété de l’administration des hospices. Ce fut là qu’un arrêté du conseil-général des hospices, du 18 floréal an X (3 mai 1802), établit l’hôpital de l’Enfant-Jésus, dont la pieuse et touchante dénomination a survécu dans le langage