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Mon verre est vide. Au ciel la nuit poursuit son vol,
Et toujours cette odeur pénétrante m’arrive
Avec le chant lointain du dernier rossignol
Et les premiers cris de la grive.

Je m’endors, et tandis que le pâle matin,
Frissonnant, sur le front des collines se lève,
La fleur des pampres verts et le bouquet du vin
Embaument l’azur de mon rêve.


AMOURS ÉTERNELLES.


Quand les soleils tombans du soir
Dardent au faîte du miroir
Un rayon de lumière oblique,
Parmi des flots d’atomes d’or
Le vieux trumeau sourit encor
Au grand salon mélancolique.

Dans un cadre à biseau doré
On voit, à la marge d’un pré,
Le berger près de sa bergère.
Leurs clairs regards sont attendris,
Et sur leurs fronts les saules gris
Font trembler une ombre légère.

Les troupeaux broutent le gazon.
Vers les lointains de l’horizon,
Un fin brouillard bleu s’évapore ;
Le berger d’un air langoureux
Module un soupir amoureux
Sur sa flûte de buis sonore.

Et devant ce couple ingénu
On rêve d’un monde inconnu,
Où les cœurs épris et fidèles
Ignorent les tristes revers
Et tous les lendemains amers
De nos pauvres amours mortelles.