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Page:Revue des Deux Mondes - 1877 - tome 20.djvu/140

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en effet que le comité d’administration a dû sacrifier 200,000 dollars du fonds social (1 million) pour le maintenir pendant une année.

Le premier numéro du New-York Herald parut le 5 mai 1835. Dans ce premier numéro, qui se composait de douze colonnes de texte et de quatre d’annonces, Bennett expose son programme à ses lecteurs. Tout d’abord le prix de l’abonnement est réduit à 3 dollars par an (15 francs). C’est aux annonces qu’il entend demander le plus clair de ses recettes. Quant à sa ligne politique, il déclare nettement n’en pas avoir. « Notre seul guide, dit-il, sera le bon sens appliqué aux affaires. Nous n’appartenons à aucun parti, nous ne sommes l’organe d’aucune faction ou coterie et nous ne soutiendrons aucun candidat, pas plus pour la présidence que pour le plus mince emploi. Notre but est de recueillir et de donner des faits exacts, des renseignemens précis sur tout ce qui se passe. Notre journal s’adresse aux masses, au négociant comme à l’ouvrier, au banquier comme au commis. Chacun d’eux trouvera dans nos colonnes ce qui peut l’intéresser, lui servir, et tirera lui-même ses conclusions des faits que nous mettrons sous ses yeux. »

Fidèle à son programme, il supprimait les articles politiques et les remplaçait par les documens officiels, par les résultats des.élections, s’abstenant de toute appréciation, de tout commentaire. Cette tentative originale fut accueillie avec le sourire de l’incrédulité. On n’admettait pas encore qu’un journal indépendant de tout parti politique pût se maintenir quelque temps, bien moins encore prospérer. Aucune feuille jusqu’ici ne s’était occupée des affaires financières ; Bennett fut le premier qui publia une cote des fonds publics. C’est dans son numéro du 13 mai 1835 qu’elle parut. Il y rendait compte des ventes et achats effectués a la bourse de la-veille et dés prix obtenus par les valeurs diverses. Cette innovation fut fort mal accueillie. Les banquiers et courtiers contestèrent son droit à rendre compte de leurs opérations ; c’était, affirmaient-ils, intervenir dans leurs affaires privées. Le New-York Herald fut assailli de réclamations, de menaces, de procès, l’éditeur lui-même fut injurié et maltraité à la Bourse ; mais le bruit qui se faisait autour de la feuille nouvelle attirait sur elle l’attention et lui amenait dès abonnés et des acheteurs.

La crise financière de 1837 assura son succès : prédite par lui, annoncée jour par jour dans son bulletin financier, elle lui donna une autorité tells qu’on cessa de contester l’utilité de ses renseignemens. Son exemple trouva promptement des imitateurs : ses concurrens, qui avaient été les plus ardens à le blâmer, suivirent son exemple, et la masse du public sut gré au Herald d’avoir