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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




14 avril 1877.

La politique du jour est féconde en surprises. Surprise dans les affaires orientales par la précipitation des événemens ! surprise à Berlin par réclipse momentanée de M. de Bismarck en pleine crise diplomatique de l’Europe ! Ainsi les coups de théâtre se succèdent, l’un jeté brusquement comme une énigme à la curiosité universelle, l’autre mettant plus que jamais à nu le trouble de la politique générale, dévoilant dans sa gravité la situation du moment.

Autrefois lord Paimerston parlait avec sa liberté humoristique de ces printemps qui débutent comme des lions prêts à se déchaîner. Le cours des choses semble nous ramener à un de ces printemps ; celui-ci débute à peine, et de tout ce qu’on a fait récemment, de ce qu’on a eu l’intention de faire pnur la paix, de ce voyage accompli le mois dernier avec une certaine ostentation par le général Ignatief à la recherche d’un acte de conciliaiion européenne, voilà ce qui reste : une déception, peut-être un préliminaire de guerre sous la forme d’un protocole inutile, menacé déjà d’être emporté par les événemens avant d’avoir été une réalité sérieuse. C’est en effet l’étrange fortune de ce malheureux protocole du 31 mars, si péniblement conquis, de n’avoir été qu’un grand espoir, de n’avoir eu une certaine importance qu’avant d’être connu, tant qu’on travaillait à le mettre au monde, et de s’être pour ainsi dire évanoui dans son insignifiance ou son inefficacité le jour où il a été connu. Jusqu’au dernier moment, il a pu être considéré comme un gage de paix, cojime l’expression laborieusement combinée de l’accord de l’Europe, et les peines mêmes qu’il coûtait entretenaient la confiance. Lorsqu’il a été divulgué avec les supplémens et les commentaires, on s’est aperçu aussitôt que la diplomatie s’était donné beaucoup de mouvement pour une médiocre victoire, qu’il n’y avait rien de changé, que la situation en un mot restait ce qu’elle était, — avec cette aggravation