décisions du roi, depuis le mois de mars 1848 jusqu’au mois de décembre 1850 ; on verra que tous ses actes, malgré les perpétuelles contradictions dont ils paraissent empreints, sont l’application constante et obstinée de son système.
Pendant toute l’année 1848, Frédéric-Guillaume IV ne néglige aucune occasion de commenter à sa manière les mots qu’il a prononcés le 18 mars : « Je serai le roi allemand ; » en même temps, il oppose une résistance continuelle à tout ce que l’assemblée nationale de Francfort prépare avec tant d’ardeur pour donner à la Prusse l’empire d’Allemagne. Le 15 août, dans les fêtes où il célèbre magnifiquement, et dans une intention symbolique si manifeste, l’inauguration de la cathédrale de Cologne, il porte un toast « aux architectes du grand édifice de l’unité germanique, » en d’autres termes à l’assemblée nationale, dont les délégués ont été invités au banquet ; or, dans ces mêmes fêtes, recevant le président de l’assemblée, M. Henri de Gagern, et les vingt-cinq députés qui l’accompagnent, il leur adresse une allocution d’où se détache cette phrase, prononcée du ton le plus significatif : « N’oubliez pas, messieurs, qu’il y a des princes en Allemagne, et que je suis un de ces princes. » Qu’est-ce à dire ? Ici presque un éloge, là presque un blâme ; ici, un encouragement, là un avertissement. Cela signifie : vous avez raison de vouloir travailler à l’unité de l’Allemagne, car ce doit être notre pensée à tous ; mais, prenez garde, vous êtes engagés dans une voie fausse, et votre travail ne vaut rien.
Au mois de novembre 1848, l’assemblée nationale, votant la constitution du futur empire, décide que l’Autriche ne fera plus partie de l’Allemagne ; Frédéric-Guillaume IV, sans tenir, bien entendu, aucun compte de ce vote révolutionnaire, continue à chercher le moyen de réaliser le système qu’il a imaginé : la suprématie du titre réservée à l’Autriche, la direction réelle attribuée à la Prusse. Au moment où l’assemblée nationale vient d’exclure la monarchie autrichienne du sein de la communauté germanique, il redouble de respect filial à son égard, il envoie note sur note au cabinet de Vienne, il lui soumet les combinaisons qui peuvent être le plus agréables aux Habsbourg, il lui propose de refaire l’œuvre du parlement de Francfort au moyen d’un congrès de princes présidé par l’Autriche et la Prusse. Le prince de Schwarzenberg, irrité du rôle que l’opinion publique assigne à la Prusse, a beau rejeter les offres du roi et le traiter en suspect, aucune dureté, aucune offense ne peut ébranler la foi de Frédéric-Guillaume. C’est un illuminé, un visionnaire. Attaqué de droite et de gauche, il poursuit sa route en souriant. Dans la mêlée de plus en plus confuse, il ne voit que son système : l’Autriche avant tout, l’Autriche au-dessus de tout, et la Prusse, respectueuse et fière, debout à la droite de l’Autriche.