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Havre. Ne pourrait-on point obvier à ce désagrément d’un genre particulier, en faisant un département distinct, sous le nom de Seine-Maritime, d’une partie de la Seine-Inférieure ? Le Havre serait le chef-lieu naturel de ce nouveau département. Qui pourrait s’opposer à une modification devenue si pressante ? On a bien su, lors de l’annexion de Nice à la France, créer sous le nom d’Alpes-Maritimes un département dont l’utilité se faisait moins sentir que pour celui-là, et qui détachait même du département du Var la petite rivière qui avait donné son nom à ce dernier. Dans ces sortes de choses, ce qu’il faut éviter c’est le mécontentement des citoyens. Il faut veiller à ce que les affaires reçoivent partout la solution la plus prompte et la plus satisfaisante ; il faut se dire qu’il n’est pas de petite question ; il faut penser à tout, tout prévoir, tout résoudre, il faut surtout faire en sorte que l’étranger ne profite pas de nos imprévoyances, de nos malheurs passés, pour s’élever au-dessus de nous et conquérir une suprématie que nous ne saurions lui faire perdre plus tard.

Le Havre, malgré ses développemens qu’on ne saurait nier, souffre comme tous nos ports. Le dernier recensement y indique néanmoins une augmentation de 5,000 habitans depuis 1872. Avec toutes les améliorations qui viennent d’être réclamées, avec l’abaissement des tarifs de transport intérieur, les affaires y auraient pris un tel accroissement, une telle activité, qu’il y aurait eu certainement à constater une augmentation de population beaucoup plus grande. Et ce ne sont pas seulement les tarifs de transport intérieur qui gênent l’essor du Havre. Si ceux-ci sont trop élevés, les tarifs de transport extérieur, c’est-à-dire les frets maritimes, ont été tellement avilis pendant l’année 1876, par l’effet d’une concurrence effrénée et d’autres raisons économiques, que la navigation transocéanienne à vapeur en a considérablement souffert. Des marchandises ont été transportées d’Angleterre en Amérique au prix de 5 francs la tonne (c’est le prix de Rouen au Havre) et des passagers pour 50 francs. Le port du Havre a éprouvé plus que tout autre le contre-coup de cette crise, parce que les droits de navigation y sont plus élevés que partout ailleurs. Ainsi M. le capitaine de frégate Vial, agent principal de la compagnie transatlantique, nous apprend que, pour le voyage d’un des paquebots de cette compagnie, les droits de quai, de navigation, de tonnage, de péage, enfin le droit sanitaire, se sont élevés au Havre à la somme totale de 9,713 francs. A New-York, le même navire n’a eu à payer que 3,259 francs, ou trois fois moins.

A côté des difficultés locales de tout genre particulières à chaque port, il y a les difficultés générales qui sont inhérentes à tous et qui affectent si grandement notre commerce extérieur. Notre éducation