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s’étaient multipliés outre mesure, notamment à l’occasion des difficultés relatives à l’inscription sur les listes électorales. L’ordonnance du 1er juin 1828, préparée par une commission composée de magistrats et de membres du conseil et contre-signée par M. Portails, limita les cas dans lesquels l’administration pourrait user du droit de conflit et organisa une procédure qui ménageait les justes susceptibilités de l’autorité judiciaire.

Cette tâche accomplie, une autre commission fut chargée de préparer une loi sur l’organisation du conseil d’état. Ici les questions étaient plus difficiles à résoudre: l’œuvre n’était pas achevée quand le ministère Martignac fut renversé ; mais le nouveau garde des sceaux, M. Courvoisier, en comprit l’utilité, et sous sa présidence la commission adopta, au mois de janvier 1830, un projet de loi qui constituait dans le sein du conseil d’état un conseil du contentieux, composé de quinze membres nommés à vie, pour examiner les affaires contentieuses, après avoir entendu en séance publique les avocats des parties et les conclusions des commissaires du gouvernement. M. de Cormenin avait contribué beaucoup à faire adopter cette solution qu’il avait soutenue devant la chambre des députés en 1829 dans un discours fort remarqué.

On voit l’importance des réformes que le gouvernement allait proposer aux chambres lorsque survint la révolution de 1830. Le ministre chargé de présider le conseil d’état dans le premier cabinet formé après la révolution de 1830 était le duc de Broglie. Dès le 20 août 1830, une nouvelle commission fut instituée pour préparer un projet de loi sur la réforme à introduire dans l’organisation et les attributions du conseil. Elle était présidée par Benjamin Constant, devenu président de la section de législation et de justice administrative. Le but assigné à ses travaux n’était pas celui que poursuivaient M. Portails et M. Courvoisier : donner des garanties aux justiciables sans porter atteinte au principe fondamental qui ne permettait pas aux tribunaux civils de contrôler les actes de l’administration. Il s’agissait au contraire de réaliser les idées exprimées dans l’article de la Revue française et de renvoyer aux tribunaux civils la plupart des questions soumises à la juridiction administrative. La commission fit un travail très approfondi. À la suite de longues délibérations, M. de Vatimesnil, nommé rapporteur, rédigea un projet de loi en deux cent quarante-cinq articles sur la compétence et la juridiction en matière de contentieux administratif, qui réduisait notablement les attributions des conseils de préfecture, des ministres et par suite celles du conseil d’état. Son travail était adopté en principe au mois de février 1831: mais, quand on reprit l’examen de la rédaction au mois de septembre suivant, le