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Page:Revue des Deux Mondes - 1878 - tome 29.djvu/449

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les impôts indirects ; elles paient comme tout le monde, en proportion de leurs moyens, et rien de plus. Nous croyons l’avoir démontré suffisamment, et si nous demandons un léger supplément aux taxes directes, ce n’est pas pour réparer une injustice, il n’y en a point de commise ; c’est tout simplement pour mieux assurer l’équilibre du budget, et permettre à nos législateurs de remanier celles des taxes qui sont les plus nuisibles au progrès de la richesse.

Un économiste fort spirituel, M. de Molinari, en rendant compte de l’excellent livre de M. Vuitry sur le système financer de la France dans l’antiquité et au moyen âge, disait dernièrement qu’il était fort difficile aujourd’hui encore, de savoir exactement ce que chacun de nous paie d’impôts ; il y a ceux que l’on voit et que l’on sent, et ceux que l’on ne voit pas et que l’on ne sent guère. Il avait raison ; si l’on ne se préoccupe que de l’incidence première, le calcul n’est pas aisé à faire. Mais ce n’est pas là ce qu’il faut chercher, ce qui importe c’est le résultat définitif, et pour celui-là il est facile de le connaître on n’a qu’à rapprocher le chiffre du budget de celui du revenu brut du pays. Si ce budget est de 3 milliards par rapport à un revenu de 20, les ressources particulières de chacun de nous sont atteintes de la même manière, sous une forme ou sous une autre ; nous payons au fisc le septième environ de notre revenu, qu’il consiste en rentes, en traitemens ou en salaire. Voilà la vérité vraie et le dernier mot de la science. La forme de l’impôt n’a d’importance réelle qu’au point de vue du développement de la richesse ; il faut celle qui y nuit le moins, aujourd’hui surtout que nous sommes en présence de la concurrence universelle et qu’il s’agit d’affranchir la production de tous les obstacles qui la gênent. S’il nous était permis de faire une comparaison, peut-être un peu familière, mais qui rendrait bien notre pensée, nous dirions ceci : Quand on veut obtenir d’un cheval de course qu’il développe tous ses moyens, on commence par diminuer le poids qu’il est appelé à porter, on égalise ce poids avec celui des concurrens ; on s’applique ensuite à le bien équilibrer, de façon qu’il ne pèse pas trop sur les parties du corps où il deviendrait le plus incommode. Eh bien on doit agir de même avec les impôts, il faut les alléger le plus possible, et les réparti ensuite sur toutes les branches de la richesse, afin qu’ils n’en écrasent aucune. Telle est, nous ne pouvons trop le répéter, le véritable problème à résoudre, il n’y en a pas d’autre. Et pourquoi, à la fin de ces études, proposons-nous l’impôt sur le revenu ? C’est précisément pour fournir ce moyen d’allègement et arriver à une répartition meilleure.

Maintenant, comment convient-il d’établir cet impôt ? Il faut le généraliser autant que possible, et ne point admettre pour ainsi dire