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qui frappe bien des gens, est plus spécieuse que réelle. Non, les riches ne consomment pas directement beaucoup plus des choses taxées que les pauvres, mais ils les consomment indirectement en les remboursant à ceux dont les services leur sont nécessaires, au tailleur qui leur vend un habit, à l’entrepreneur qui construit leur habitation, aux ouvriers qu’ils emploient sous diverses formes. Et quant à ceux qui ne dépensent pas leurs revenus, qui en économisent une partie qu’ils prêtent, ils retrouvent la taxe dans l’intérêt qu’on leur sert, et qui sera d’autant moins élevé que l’emprunteur aura plus d’impôts à subir. En un mot ces taxes font partie des charges générales de la société, et comme elles sont acquittées par le revenu brut sur lequel nous vivons tous, la part que chacun prend dans ce revenu donne la mesure de celle qu’il a dans l’impôt. L’une est exactement proportionnelle à l’autre. Cela est d’une vérité absolue.

Nous avons fait ressortir encore que les taxes de consommation étaient les meilleures, parce qu’elles se paient aisément, sans décourager personne; elles n’ont qu’un défaut, celui d’exiger beaucoup d’employés, d’être d’une perception assez chère, et de donner lieu quelquefois à des mesures inquisitoriales. Mais ces défauts se corrigent tous les jours, et on les verra disparaître lorsque la moralité publique sera plus développée encore et qu’on pourra compter davantage sur la déclaration des contribuables. Du reste ces taxes sont si bien conformes au progrès, que tous les états qui veulent avoir de bonnes finances s’empressent d’y recourir. C’est de l’empirisme, dira-t-on. Mais de l’empirisme qui réussit si bien et depuis si longtemps ressemble beaucoup à de la vraie science. En un mot : obligation pour tous de payer l’impôt, proportionnalité mieux assurée avec les taxes indirectes qu’avec les autres, et meilleurs résultats économiques obtenus. Tels sont les trois points que nous avons cherché à mettre en lumière dans ces études.


VICTOR BONNET.