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de la zone tempérée empiète sur plusieurs points sur le domaine de la flore arctique ; tandis que sur d’autres, c’est au contraire cette dernière qui vient échancrer la première. Les émanations provenant des grands courans de l’Atlantique et du Pacifique, le Gulf-stream et le Tessan, font pénétrer la flore de la zone tempérée jusqu’en Laponie et sur les rivages de l’Amérique russe, tandis que le courant polaire fait descendre la flore arctique jusqu’au Labrador et à la pointe méridionale du Groenland, c’est-à-dire à la latitude de Stockholm.

Les effets de la température ne se font pas seulement sentir dans le sens de la longitude, en allant de l’équateur aux pôles, mais aussi dans le sens de l’altitude, en s’élevant de la plaine au sommet des montagnes, et l’on peut souvent traverser, en quelques heures, plusieurs zones de végétation, depuis les champs de céréales qui jaunissent la plaine, jusqu’aux neiges perpétuelles, en suivant des pentes couvertes d’abord de vignobles, puis de bois feuillus, puis de bois résineux, puis de simples pâturages de graminées.

Nous avons dit plus haut que l’influence thermique était avec l’eau le facteur principal qui détermine l’habitat des diverses essences forestières dont les mêmes familles se retrouvent partout où la température moyenne est sensiblement la même. Cette influence thermique se manifeste soit par les extrêmes de température, soit par la température moyenne, soit par la durée de la végétation. Il y a en effet des limites de température que les plantes ne peuvent franchir et au-delà desquelles elles périssent inévitablement; ces limites varient suivant les espèces, car les unes peuvent supporter des froids qui font périr les autres, et l’on a reconnu que la température moyenne de 10 degrés, au mois de juillet, pouvait être considérée comme la limite de la végétation arborescente. Il est nécessaire en outre, pour que les arbres puissent se perpétuer, que la somme de chaleur annuelle soit suffisante pour en assurer la fructification; il faut enfin que la période comprise entre la première apparition des feuilles et la complète maturation du fruit soit assez longue pour que toutes les phases de la végétation puissent s’accomplir régulièrement. Si les arbres résineux supportent des climats plus rigoureux que les bois feuillus, c’est parce que, grâce à leurs feuilles persistantes, ils commencent à végéter aux premiers beaux jours, sans perdre, comme ces derniers, un temps précieux à refaire leur appareil foliacé; ils peuvent donc se contenter d’une période de végétation plus courte que ces derniers.

Les conditions que réclament les diverses espèces sont donc très variables, mais c’est l’accroissement du froid qui en limite généralement l’habitat; aussi le nombre de ces espèces augmente-t-il avec