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depuis duchesse d’Aiguillon. Le mariage s’était fait à l’insu de Louis XIII et avec le seul consentement de Marie de Médicis ; il se rattachait aux intrigues que celle-ci, de concert avec Gaston, ourdissait contre la France, et avait été le gage d’une alliance de ce prince avec les ennemis du royaume, tout prêts à l’envahir. La réalisation de cet hymen avait été d’abord traversée par la situation que faisait au duc de Lorraine l’attitude menaçante de la France à son égard. Le cardinal ne pardonnait pas à Gaston les offenses qu’il en avait reçues. Charles III, qui s’était rendu à Metz près de Louis XIII, alors occupé au siège de Moyenvic, n’avait pas osé avouer que le mariage était consommé ; il en avait nié l’existence, et le roi n’en reçut la notification officielle que deux années après par le duc d’Elbeuf, que Gaston, retiré à Bruxelles, avait chargé du message. La colère de Louis XIII fut grande, et dès ce moment il mit tout en œuvre pour obtenir la cassation du mariage. Il était nécessaire au reste de se hâter, car, de Bruxelles, Marguerite faisait agir de son côté ; elle entendait demeurer la femme de Gaston, malgré la rude leçon infligée par l’armée française à son frère, le duc de Lorraine. Les Espagnols, sous la protection desquels s’était mise la jeune princesse, soutenaient ses prétentions. Ce qu’il y avait de plus grave, c’est qu’aux Pays-Bas le clergé donnait raison à Marguerite. L’archevêque de Malines l’avait déclarée épouse légitime. Richelieu devait craindre que le pape ne sanctionnât la décision épiscopale. Gaston avait en effet dépêché pour Rome sa créature Passart, qui fut arrêté sur le territoire français par ordre du cardinal et envoyé à la Bastille. Il importait donc d’opposer au plus tôt à l’opinion de l’archevêque de Malines, à la consultation qu’avaient donnée dans le même sens l’université de Louvain et divers théologiens, la déclaration des représentans de tout le clergé français, et tel était le motif qui avait fait saisir l’assemblée du point de droit énoncé ci-dessus dès que Louis XIII se fut convaincu de l’impossibilité d’amener son frère à une répudiation. Ouvertures conciliantes, puis menaces, avances aux amis du prince, puis emprisonnement de quelques-uns d’entre eux, tout avait échoué. Gaston, qui, séduit par des promesses, avait eu l’imprudence de revenir en France, s’était finalement retiré à Blois, sans vouloir rien accorder.

Les commissaires du roi exposèrent en un langage respectueux la question à l’assemblée. Ils n’eurent pas grands efforts à faire pour s’en concilier les bonnes dispositions. Les députés, mus par un sentiment patriotique, n’étaient pas en général favorables à Gaston. Ils hésitaient pourtant à prononcer dans un sens que paraissait repousser la jurisprudence canonique. A l’invitation de son président Henri de Sourdis, archevêque de Bordeaux, l’assemblée désigna une