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vents sont réguliers, et la zone tempérée, où la lutte entre deux courans atmosphériques contraires produit les temps incertains que nous connaissons tous, règne une zone de calmes relatifs vers le tropique du cancer. En Afrique, en Arabie, en Asie, sous la même latitude ou à peu près, le calme est habituel. L’air ne s’y renouvelle pas ; l’Océan n’y envoie pas ses vapeurs; de là la rareté des pluies, l’extrême siccité du sol. Que l’on s’avance au nord, les brumes de la Méditerranée y remédient; au sud, le phénomène s’efface aussi, parce que les pluies équatoriales s’y font sentir. Au-dessous de Tombouctou, le sol n’est ni plus accidenté ni d’une autre composition qu’à la latitude de Mourzouk, et cependant un beau fleuve, le Niger, y roule des eaux abondantes.

Ainsi le Sahara n’a pas de frontières mieux définies vers le sud que vers le nord, puisque ses frontières n’ont aucun caractère géographique. Il cesse où commence la région des pluies équinoxiales ; où l’eau se montre, le désert n’a plus de raison d’être. Le pays change alors de nom; c’est le Soudan, qui est borné lui-même, du côté du midi, par une chaîne de hautes montagnes. Entre ces montagnes et les rivages du golfe de Guinée, il n’y a qu’une bande assez étroite de terrain; mais si malsaine que les Européens en sont pour ainsi dire exclus. Les populations qui l’occupent, abruties par l’abus des boissons alcooliques, démoralisées par la traite, passent pour être les plus cruelles de l’Afrique. Borné vers l’ouest par le Sénégal dont on connaît le climat redoutable, du côté de l’orient par les provinces de la Haute-Egypte dont l’accès est peu facile, le Soudan se trouve renfermé entre des frontières presque inaccessibles. Si peu connue que soit cette région, on s’est habitué à en dire plus de mal qu’elle ne le mérite.

S’il faut en croire les géologues, qui n’en parlent au reste que par ouï-dire, car aucun d’eux n’a pénétré jusque-là, les montagnes qui bordent le Soudan de deux côtés sont granitiques ; il s’y trouve aussi des formations de grès de l’époque jurassique; mais les terrains plus modernes font défaut. On serait tenté de croire que c’est un sol émergé du sein de l’Océan depuis les premiers temps du monde, en sorte qu’aucune couche des sédimens modernes n’a pu s’y déposer. A l’appui de cette opinion, on fait valoir que les sables aurifères sont abondans et que le sel marin fait défaut presque partout. Le lac Tchad, où se concentrent les eaux d’un vaste bassin géographique, n’est même pas salé. Il semblerait d’après cela que le sol ne doive pas être fertile; les pluies périodiques ont une telle vertu sous ces latitudes basses que la terre y donne sans culture une foule de produits précieux, le riz, le coton, les fruits oléagineux. La canne à sucre et l’arbre à café y sont peu connus; on les y acclimaterait sans peine. Comme climat et comme conditions de culture,