privé, c’est-à-dire l’intérêt de chacun, et partant celui de tous ; n’est-il pas, dans un cas comme dans l’autre, bon juge de ce qui convient à chacun ?
En thèse générale et sauf exception dûment justifiée, le gouvernement ne doit-il pas, dans un cas comme dans l’autre, se garder d’intervertir le cours naturel des choses ?
Toute protection accordée à tel ou tel produit contre l’introduction de tel ou tel produit similaire provenant de l’étranger a-t-elle un autre but que d’élever artificiellement le prix du produit national ? Cet excédant de prix est-il autre chose qu’une taxe prélevée sur les consommateurs au profit des producteurs nationaux ? Les producteurs peuvent-ils cette fois réclamer légitimement protection, en leur propre nom, pour leur propre compte, dans un intérêt exclusivement personnel ? Sont-ils dispensés, dans cette occasion, plus que dans toute autre, de prouver que leur intérêt se confond avec l’intérêt public, qu’ils agissent pour tous et non pour eux seuls, et qu’en définitive ils font les affaires des consommateurs autant et plus que les leurs ?
Personne, en théorie du moins, ne l’a jamais prétendu ; mais il fut un temps, et ce temps n’est pas encore assez éloigné de nous pour qu’il soit permis de l’oublier, il fut un temps où l’on soutenait qu’en tout pays tous les habitans étaient à peu près également intéressés à protéger, à peu près dans toutes ses branches, l’industrie nationale contre l’industrie étrangère ; qu’aucun pays ne devait subir la condition de tributaire de l’étranger, pour peu qu’il dépendît de lui de s’y soustraire.
Ce temps n’est plus ; aucun gouvernement, de nos jours, quelques principes qu’il professe en économie politique, n’entend interdire à ses administrés le commerce extérieur ; tous, au contraire, s’efforcent d’ouvrir sans cesse à ce commerce de nouveaux débouchés ; tous tiennent à prouver chaque année, par des tableaux hérissés de chiffres, que leurs efforts n’ont pas été vains.
Personne aujourd’hui, protectionniste ou non, personne, à quelque pays qu’il appartienne, n’entend qu’on élève, autour de ce pays-là, la grande muraille de la Chine ; qu’on l’oblige à produire, coûte que coûte, pour son propre usage, des denrées, des marchandises auxquelles se refusent son sol, son climat, ses circonstances particulières ; qu’on lui défende de vendre à l’étranger l’excédant des produits de son industrie naturelle ou acquise.
Sans aller jusqu’à défendre tout commerce extérieur, il fut un temps où l’on estimait que l’exportation des métaux précieux était pour tout pays, une cause certaine de ruine, et leur importation presque l’unique source de la richesse ; qu’en conséquence le commerce extérieur ne devait être favorisé ou même toléré qu’avec les